Projet de loi de lutte contre le terrorisme : vers une protection renforcée des témoins

Le projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale prévoit de renforcer le régime de protection des témoins.

 

Saint-Denis, 18 novembre 2015. Un précieux témoignage permet au RAID de localiser la planque de trois terroristes présumés. Après sept heures d’opérations, tous seront neutralisés. (Crédits : Jérôme Groisard / AP)

Mercredi 3 février 2016, soit près de trois mois après les terribles évènements qui ont frappé Paris et Saint-Denis, Jean-Jacques Urvoas (garde des sceaux), Michel Sapin (ministre des finances) et Bernard Cazeneuve (ministre de l’intérieur) présentent ensemble en Conseil des ministres le très attendu projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale (1).

Déjà validé par le Conseil d’Etat, ce projet se retrouve aujourd’hui mardi 1er mars 2016 en première lecture devant l’Assemblée nationale. Son contenu présente un triple objectif (2) :

  • Renforcer l’efficacité de la lutte contre la criminalité organisée, et notamment le terrorisme, en donnant de nouveaux moyens d’investigation au parquet et au juge d’instruction ;
  • Renforcer, de même, les garanties au cours de la procédure pénale, spécialement lors des phases d’enquête et d’instruction, afin de rendre conforme la procédure aux exigences constitutionnelles et européennes ;
  • Simplifier, enfin, tous les stades de la procédure dans le but de faciliter le travail des enquêteurs et des magistrats.

 

L’insuffisance des mesures de protection actuelles

La question des témoins est abordée dans le titre 1er  du projet, relatif aux dispositions renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement. A l’heure actuelle en France, seules deux dispositions du Code de procédure pénale assurent la protection des témoins.
L’article 706-57 leur permet d’abord, sur autorisation du procureur de la République ou du juge d’instruction, de déclarer comme domicile l’adresse du commissariat ou de la brigade de gendarmerie ou bien, s’ils ont été convoqués en raison de leur profession, l’adresse du siège de leur entreprise.

L’autre mesure concerne le témoignage sous X. Présentée à l’article 706-58, elle permet aux témoins, à titre exceptionnel, de livrer des déclarations sous X sur autorisation du juge des libertés et de la détention saisi par requête motivée du procureur de la République ou du juge d’instruction. Mais ce dispositif n’est applicable que si l’audition des témoins est susceptible de mettre leur vie ou leur intégrité physique en péril, ainsi que celle de leur famille ou de leurs proches.

 

Un troisième niveau de protection en discussion

Le chapitre II du titre 1er du projet de loi prévoit de renforcer le régime de protection des témoins. A l’image de ce qui se pratique Outre-Atlantique, la France devrait en effet se doter d’un troisième niveau de protection, qui permettrait aux témoins de changer leur identité et de se réinstaller.

Ainsi, l’article 5 du projet de loi annonce qu’en matière de crimes contre l’humanité, ou pour d’autres infractions graves, l’audition des témoins peut se dérouler à huis-clos, en cas de risques graves de représailles, afin d’empêcher leur identification.

L’article 6 permet également, pour les mêmes raisons et dans toutes les procédures concernant des délits punis d’au moins trois ans d’emprisonnement, que les témoins soient entendus publiquement en étant seulement identifiés par un numéro, sans que leur véritable identité ne soit diffusée.

Il institue en outre un dispositif de protection des témoins exposés à des risques graves de représailles similaire à celui applicable aux repentis, permettant notamment l’octroi d’une identité d’emprunt.

 

Alexis Dumas

[1] Compte rendu du conseil des ministres du 3 février 2016

[2] Projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale

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