L’entrée en vigueur de la loi relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions

La loi du 15 août 2014 sur la récidive et sur la contrainte pénale est entrée en vigueur, en partie, le 1er octobre 2014. La seconde partie des dispositions contenues dans ce texte entre en vigueur aujourd’hui, le 1er janvier 2015.

Nous revenons sur les principales dispositions de cette loi, importante techniquement pour la procédure pénale et symboliquement pour le sens de la peine, sous forme de « fiche technique ».

 

 

Dispositions concernant les récidivistes

La loi en question abolit le régime des peines planchers des articles 132-1 (en matière criminelle), 132-19-1 et 132-19-2 (en matière correctionnelle) du Code pénal (art. 2 et 7) – 1er octobre 2014.

Aussi, les seuils d’exécution de la peine privative de liberté à partir desquels les condamnés peuvent prétendre à la libération conditionnelle sont unifiés pour les primo-délinquants et les récidivistes à la moitié de la peine, conformément au nouvel article 729 du Code de procédure pénale (art. 15 et 54) – 1er octobre 2014.

De même, l’interdiction pour les condamnés récidivistes de solliciter une libération conditionnelle lorsqu’ils exercent l’autorité parentale sur un mineur de 10 ans et que ce dernier a sa résidence habituelle chez ce parent, soit l’alinéa 2 de l’article 729-3 du Code de procédure pénale, est abrogée (art. 15 et 54) – 1er janvier 2015.

Enfin, les montants des crédits de réduction de peine accordés aux récidivistes sont abrogés, alignant leur régime au droit commun, aux articles 721 et 721-1 du Code de procédure pénale (art. 54) – 1er janvier 2015.

Toutefois, l’aménagement de la peine privative de liberté concerne les peines n’excédant pas un an d’enfermement pour les récidivistes et deux pour les primo-délinquants : l’article 474 du Code de procédure pénale n’ayant pas été modifié à ce niveau.

 

 

Dispositions concernant la contrainte pénale – 1er octobre 2014

La « contrainte pénale » correspond à une peine en milieu ouvert, remplaçant la peine de privation de liberté. Elle est constituée d’obligations identiques à celles qui peuvent être prononcées pour un aménagement de peine, comme il est prévu à l’article 134-1-1 du Code pénal (art. 19).

La contrainte pénale peut être prononcée pour les délits punis de cinq ans d’emprisonnement par la juridiction de jugement ou par le juge de l’application des peines (art. 19 et 22). Ces obligations peuvent évoluer à chaque évaluation de la situation du condamné par le SPIP (art. 22). Ce seuil doit disparaître au 1er janvier 2017.

Lorsque les obligations ne sont pas respectées, le JAP peut modifier ces obligations ou saisir le Président du TGI afin que la peine privative de liberté soit mise à exécution (art. 22).

 

 

Motivation renforcée des décisions de condamnation à un emprisonnement ferme (art. 3) – 1er octobre 2014

L’emprisonnement devient l’exception, selon les termes de l’article 132-19 du Code pénal tel qu’issu de la présente loi. Les magistrats sont tenus de motiver « spécialement » leur décision de condamnation à de l’emprisonnement ferme, « au regard des faits de l’espèce et de la personnalité de leur auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale ».

 

 

Détermination de la peine d’amende (art. 3) – 1er octobre 2014

La peine d’amende doit être déterminée « en tenant compte des ressources et des charges de l’auteur de l’infraction », selon le nouvel alinéa 2 de l’article 132-20 du Code pénal.

 

 

Extension des mesures de contrôle du condamné (art. 9) – 1er octobre 2014

Les condamnés dont la peine est aménagée sont tenus, en plus des obligations préexistantes énoncées à l’article 132-44 du Code pénal, d’obtenir l’autorisation du JAP pour tout changement d’emploi ou de résidence de nature à mettre obstacle à l’exécution de ses obligations, et d’informer le JAP de tout déplacement à l’étranger.

 

 

Extension des obligations auxquelles le condamné peut être soumis (art. 9 et 10) – 1er octobre 2014

Les condamnés dont la peine est aménagée pourront être soumis, en plus des obligations déjà prévues à l’article 132-45 du Code pénal, à l’obligation de se présenter à l’épreuve du permis de conduire et de prendre des cours de conduite (avec leur accord), de ne pas prendre part à des jeux d’argent et de hasard, et d’obtenir l’autorisation du JAP pour un déplacement à l’étranger.

 

 

Disparition de la possibilité de ne prononcer qu’une seule fois la révocation partielle du sursis (art. 11) – 1er octobre 2014

La présente loi abroge l’alinéa 1er de l’article 132-49 du Code pénal qui limitait à une seule fois la possibilité d’attribuer la révocation partielle d’un sursis.

 

 

Possibilité d’ajourner le prononcé de la peine (art. 5 et 6) – 1er octobre 2014

Le Code pénal est complété des articles 132-70-1 à 132-70-3 qui viennent permettre à la juridiction de jugement décide de diligenter des investigations complémentaires à l’égard de la personne condamnée afin d’individualiser au mieux la peine qu’il devra exécuter, ainsi que de demander la consignation d’une somme d’argents à fin de paiement de l’amende dont le montant sera déterminé après les investigations.

 

 

Extension des pouvoirs de police (art. 35) – 1er octobre 2014

L’article 41-1-1 du Code de procédure pénale modifie et étend les possibilités de l’OPJ pour transiger avec les auteurs d’infractions, à condition que l’action publique n’ait pas été mise en mouvement et sur autorisation du procureur de la République.

En plus des contraventions, pour lesquelles cette mesure était déjà possible, la présente loi ajoute : les délits prévus par une peine d’amende, les délits punis d’un an d’emprisonnement au plus, et quelques autres délits spéciaux.

La transaction peut consister dans une amende transactionnelle, qui ne peut excéder le tiers du montant maximum de l’amende prévue par la loi. L’OPJ peut recourir à la consignation d’une somme d’argent, de la part du mis en cause, en vue de garantir le paiement d’une amende, qu’elle soit transactionnelle ou judiciaire.

La transaction peut également consister dans la réparation du dommage qu’a causé l’infraction.

Ces obligations peuvent être assorties de délais d’exécution.

La transaction doit être homologuée par le président du TGI. Cette homologation interrompt le délai de prescription de l’action publique, qui s’éteint lorsque les obligations fixées sont remplies.

A défaut d’homologation ou de bonne exécution, le procureur de la République engage des poursuites.

 

 

Extension des droits des personnes soupçonnées d’avoir violé leur contrôle judiciaire (art. 34) – 1er octobre 2014

Les personnes soupçonnées d’avoir violé leur contrôle judiciaire peuvent être appréhendées et « retenues » pour un délai de 24 heures au plus (dispositions déjà existantes ; C. pr. pén., art. 141-4). Elles doivent alors se voir notifier les mêmes informations et droits que le gardé à vue. Elles ne peuvent faire l’objet d’investigations corporelles internes.

 

 

Création d’un régime identique pour les personnes ne respectant pas les obligations de leurs condamnations (art. 34) – 1er octobre 2014

Le Code de procédure pénale intègre un nouvel article 709-1-1 qui prévoit un régime identique à celui des personnes soupçonnées d’avoir violé leur contrôle judiciaire pour les personnes ne respectant pas les obligations de leurs condamnations, autrement dit la possibilité d’une « retenue ».

 

 

Extension des questions posées aux jurés (art. 17) – 1er octobre 2014

Lorsque la Cour d’assises, conformément à l’article 361-1 du Code de procédure pénale, a constaté la culpabilité de l’accusé et a jugé que son état ne permettait pas de faire application de l’alinéa 1er de l’article 122-1 du Code pénal (irresponsabilité pénale), elle doit se prononcer sur l’application de l’alinéa 2 du même article (atténuation de la responsabilité pénale).

 

 

Conséquences de l’atténuation de la responsabilité pénale sur la peine (art. 17) – 1er octobre 2014

Lorsque l’accusé est reconnu coupable des faits qui lui sont reprochés et que la Cour d’assises a constaté un motif d’atténuation de la responsabilité pénale, la peine privative de liberté ne peut être supérieure aux deux tiers de la peine encourue que lorsque la Cour se prononce à une majorité qualifiée (C. pr. pén., art. 362).

 

 

Libération sous contrainte (art. 39) – 1er janvier 2015

Lorsque le condamné a accompli les deux tiers de la peine restant à exécuter en milieu fermé, et lorsque le temps restant à courir est égal ou inférieur à cinq ans, la Commission d’application des peines se prononce sur la libération sous contrainte, conformément à l’article 720 du Code de procédure pénale. La libération sous contrainte peut consister dans une libération conditionnelle, un placement sous surveillance électronique, un placement à l’extérieur ou une semi-liberté, conformément au même texte.

N.B. : cet article est applicable dans le délai d’un an pour les condamnés ayant déjà accompli les deux tiers de leur peine.

 

 

Révocation expresse du sursis (art. 8) – 1er janvier 2015

La révocation du sursis, auparavant automatique dès lors qu’une personne était à nouveau condamnée dans le délai de cinq ans depuis sa dernière condamnation, doit désormais être expressément prononcée par la dernière juridiction de jugement (C. pén., art. 132-29, 132-35, à 132-39 et 132-50).

Le sursis peut être partiellement ou totalement révoqué.

 

 

Disparition des procédures simplifiées d’aménagement des peines pour les condamnés incarcérés (art. 46 et 54) – 1er janvier 2015

La loi abroge les procédures simplifiées d’aménagement des peines pour les condamnés incarcérés, à savoir les articles 723-19, 723-20, 723-22, 723-24 à 723-27 du Code de procédure pénale.

 

 

Disparition de l’aménagement automatique des fins de peine (art. 46 et 54) – 1er janvier 2015

L’article 723-28 du Code de procédure pénale, qui prévoyait l’aménagement automatique des fins de peine, est abrogé.

 

 

Antonin Péchard

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