Focus sur la future taxation des plus-values immobilières


Avant même le vote d’une loi de finances rectificative pour 2013 ou celui de la prochaine loi de finances pour 2014, l’administration fiscale, par une instruction publiée au bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) le 09 août 2013, afin de « contribuer à la fluidité du marché immobilier », vient de modifier les modalités d’imposition des plus-values immobilières des particuliers pour les cessions réalisées à compter du 1er septembre 2013. Cependant avant de détailler l’instruction (II) et ses effets (III) il convient de faire un bref rappel des précédents régimes (I).


I – Régime applicable depuis le 1er février 2012

Malgré l’usage récurrent du terme, la notion de hedge funds demeure dépourvue de définition légalement établie. L’origine d’une telle carence trouve probablement sa source dans la nature même des hedge funds. Polymorphiques, ces entités peuvent en effet recouvrir une multitude de réalités diverses et variées.

La 2ème loi de finances rectificative n°2011-1117 du 19 septembre 2011 a porté la durée d’abattement pour durée de détention de quinze ans à trente ans. L’article 150 VC-I du Code général des impôts, dans sa rédaction d’alors prévoyait les dispositions suivantes:

Lorsque l’immeuble cédé est détenu depuis plus de cinq ans, le montant de la plus-value imposable est diminué d’un abattement fixé à :

–  2 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième ;

–  4 % pour chaque année de détention au-delà de la dix-septième ;

–  8 % pour chaque année de détention au-delà de la vingt-quatrième.

La plus-value est donc purgée lors de la trentième année)

Cet abattement s’applique quelle que soit la nature de l’immeuble (bâti ou non). Il se calcule par période de douze mois, en faisant abstraction des fractions d’années. Le délai de détention court depuis la date d’acquisition (soit, en principe, la date de l’acte notarié pour les achats et les donations et la date du décès pour les immeubles reçus en héritage) jusqu’à la date de cession, constitutive du fait générateur de l’imposition.

II) Régime applicable à compter du 1er septembre 2013

Les modalités de calcul de l’abattement pour durée de détention sont modifiées pour les plus-values immobilières portant sur des biens autres que les terrains à bâtir réalisées à compter du 1er septembre 2013. Les modalités diffèrent selon qu’il s’agit de l’impôt sur le revenu ou des prélèvements sociaux. Résultant pour l’instant de la doctrine administrative, ces nouvelles règles devraient être intégrées dans la loi de finances pour 2014. Il en résulte que l’exonération totale des plus-values immobilières sera acquise à l’issue d’un délai de détention de vingt-deux ans pour l’impôt sur le revenu et trente ans pour les prélèvements sociaux.

Pour la détermination du montant imposable à l’impôt sur le revenu des plus-values immobilières, l’abattement pour durée de détention est de :

– 6 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième et jusqu’à la vingt-et-unième ;

– 4 % pour la vingt-deuxième année de détention.

Pour la détermination du montant imposable aux prélèvements sociaux des plus-values immobilières, l’abattement pour durée de détention est de :

– 1,65 % pour chaque année de détention au-delà de la cinquième et jusqu’à la vingt-et-unième ;

– 1,60 % pour la vingt-deuxième année de détention ;

– 9 % pour chaque année au-delà de la vingt-deuxième.

L’administration fiscale, une fois n’est pas coutume, a anticipé sur la nouvelle loi de finance pour 2014, en venant de mettre en ligne le nouvel imprimé (2048-IMM) de calcul des plus-values immobilières pour les cessions de biens immobiliers (autre que les terrains à bâtir) qu’il conviendra d’utiliser à compter du 1er septembre 2013.

mortgage concept 3d rendering

L’abattement exceptionnel de 25 %

Outre les changements relatifs au taux et à la cadence de l’abattement pour durée de détention, l’administration ajoute un abattement exceptionnel de 25%. Celui-ci est applicable à compter du 1er septembre 2013 et concerne l’ensemble des immeubles autres que les terrains à bâtir et non pas seulement les locaux d’habitation comme indiqué dans la mise à jour de la base Bofip datée du 2 août 2013. Dans sa mise à jour datée du 9 aout, l’administration en précise le champ d’application.

L’abattement exceptionnel de 25 % s’applique aux plus-values résultant de la cession de biens immobiliers ou de droits portant sur ces biens, autres que des terrains à bâtir ou de droits s’y rapportant réalisées dans les conditions prévues :-  à l’article 150 U du CGI par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent de l’article 8 du CGI, de l’article 8 bis du CGI et de l’article 8 ter du CGI ;-  à l’article 244 bis A du CGI par les contribuables non domiciliés fiscalement en France assujettis à l’impôt sur le revenu

L’administration exclue du bénéfice de cet abattement exceptionnel les terrains à bâtir(de l’article 257-I-2-1° du CGI) et les droits s’y rapportant ; les parts de sociétés (des articles 8 à 8 ter du CGI) à prépondérance immobilière ; les parts d’un fonds de placement immobilier ; les biens ou les droits mentionnés aux b à h du 3 du I de l’article 244 bis A du CGI.

III) Les effets de l’instruction

Selon l’instruction, la réforme de la taxation des plus values-immobilières sera applicable à partir du 1er septembre 2013. Reste qu’en l’absence de texte juridique, ces déclarations laissent perplexes les professionnels et notamment les notaires, chargés de calculer la plus-value imposable et le montant à payer.

Exception faite des litiges fiscaux, où la doctrine comporte des effets juridiques au profit des contribuables en vertu des articles L 80A et L80B du LPF, la doctrine occupe une place particulière en droit fiscal.

En principe, le droit public ne  lui reconnaît aucune valeur et ce, quelle que soit se forme;

Soit l’autorité administrative se borne à donner son interprétation d’un texte et cette interprétation ne constitue, pour le juge, qu’un élément d’information.

Soit l’administration entend fixer de véritables normes. C’est l’exercice d’un pouvoir réglementaire. Cependant la norme qui en résulte ne verra sa place reconnue que pour autant que son auteur était compétent pour l’édicter, ce qui n’est en règle générale pas le cas des ministres.  En cas d’incompétence des rédacteurs, la norme est entachée d’illégalité et le administratif refusera d’en faire application.
Ce n’est que dans le cas où l’instruction ministérielle pose des règles que le ministre était habilité à définir que la jurisprudence accepte de la regarder comme valablement réglementaire. Encore faut-il, pour être opposable, que cette instruction ait fait l’objet d’une publicité suffisante. Ce qui n’est pas le cas du Bulletin officiel des impôts, a priori transposable au BOFiP (CE 5 juillet 1991 n° 107258 sect., Artola ; CE 23 octobre 1991, SARL Camping Touring France)

Ainsi l’administration ne peut pas opposer à un contribuable les dispositions de cette instruction publiée seulement au BOFiP alors même qu’elle avait compétence pour prendre une telle instruction.  Seule la loi fait foi en droit fiscal, même si semble que la loi de finance pour de 2014 rétroagira, pour l’instant il n’en est rien. Les praticiens manquent totalement de visibilité.

De plus si cette réforme est plus favorable au contribuable, elle est, à tort ou à raison, dans son annonce, sur-valorisée. En effet si le délai de détention passe, de trente à vingt-deux ans pour échapper à toute imposition de plus-value, le délai pour être exonéré de prélèvements sociaux est de trente ans.

Enfin, en l’espace de quelques années, il s’agit aussi de l’énième réforme sur les plus-values immobilières. Dans ce climat d’instabilité juridique, difficile pour la profession immobilière de conseiller l’investisseur. Sans confiance, les investisseurs hésitent à s’engager. Evidemment, changer l’économie de l’investissement conduit à le retarder. Quant aux vendeurs de résidence secondaire et de logements locatifs, soucieux de vendre dans un délai proche, ils attendent, avec leur notaire.

Eliès SAUVAGE

Master 2 stratégie fiscale de l’entreprise

Université de Nice

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.