Vers une vraie généralisation des échanges de renseignements fiscaux ?

L’échange de renseignements fiscaux consiste en une communication par les établissements bancaires des éléments relatifs aux comptes bancaires détenus par des non-résidents, aux différentes administrations fiscales des pays de résidence des propriétaires des comptes, à savoir, entre autre, le solde des comptes et l’ensemble des revenus générés.

L’échange de renseignements a été organisé au niveau mondial entre les pays (I), mais également au niveau européen (II).

I. L’échange de renseignements fiscaux à l’échelle mondiale

En effet, au niveau mondial, l’OCDE (l’Organisation de coopération et de développement économique) a mis en place en 2014 un nouveau modèle d’échange automatique d’informations fiscales, lequel sera mis en place dès 2016 pour une première utilisation à l’automne 2017[1]. Actuellement, cet accord multilatéral en faveur des échanges automatiques d’informations a été signé par environ 90 pays.

Cet échange automatique d’informations reprend essentiellement la législation américaine dite « FATCA » (Foreign Account Tax Compliance Act). Celle-ci permet à l’administration fiscale américaine d’obtenir de la part d’établissements financiers étrangers des renseignements relatifs aux contribuables américains.

En application de la réglementation de l’OCDE, les institutions financières étrangères dans lesquelles des comptes bancaires ont été ouverts par des non-résidents, ou des structures telles que les fiducies et les fondations, doivent communiquer les renseignements relatifs à tous types de revenus d’investissement mais aussi les soldes de comptes et produits de vente d’actifs financiers de ceux-ci. Ces informations sont transmise à leur administration fiscale, laquelle a la charge de les transmettre à leurs homologues des pays de résidence des détenteurs de comptes.

Ce modèle remplace celui du TIEA (Tax Information Exchange Agreements)[2], lequel nécessitait une demande de renseignements expresse, de l’administration fiscale d’un pays A envers un pays, B concernant une personne physique exclusivement. Cette demande n’aboutissait pas nécessairement, car elle devait contenir un certain nombre d’informations, lesquels étaient déterminés souverainement par les Etats. En ce sens que, les demandes qui étaient considérées comme trop imprécises n’étaient pas traitées car elles étaient considérées comme des « pêches aux informations » (fishing expeditions).

Du fait de leurs coûts et de leur délai de traitement, ces procédures concernaient essentiellement les plus grosses fortunes. C’est la raison pour laquelle les Etats ont cherché à tendre vers une automatisation des échanges de données sans demande préalable, afin, non seulement de raccourcir les délais, mais également de toucher le plus grand nombre de contribuables. Il s’agit donc d’une systématisation progressive de coopération inter-étatique en matière de renseignements fiscaux.

II. L’échange de renseignements fiscaux dans le cadre communautaire

A l’échelle européenne, le secret bancaire a été interdit par la directive 2011/16/UE relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal. En effet, depuis le 1er janvier 2013, un Etat membre doit transmettre les renseignements concernant des comptes de non-résidents à un autre Etat en faisant la demande, même si ces données sont détenues par un établissement financier.

De plus, dans la continuité du modèle d’échange automatique d’informations mis en place par l’OCDE, l’Union Européenne a adopté la directive 2014/107/UE[3] qui permet aux autorités fiscales d’échanger automatiquement les informations relatives aux comptes financiers, et à tous les types de revenus perçus à l’étranger, quel qu’en soit le montant. Les premiers échanges automatiques d’informations devraient intervenir en 2017, grâce aux données collectées en 2016.

Par ailleurs, après avoir signé avec l’OCDE en 2013 la convention multilatérale concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale prévoyant l’échange automatique de renseignements fiscaux, la Suisse a conclu le 19 mars 2015 un accord avec l’Union Européenne afin d’introduire la norme internationale définie par l’OCDE relative à l’échange automatique de renseignements. Cet accord européen sera mis en place en 2017, année au cours de laquelle la Suisse collectera les données bancaires, avant d’établir un véritable échange d’informations en 2018. Toutefois, ce dernier ne concernera que les ressortissants étrangers.

Nous n’avons pas encore suffisamment de recul pour constater les effets de cet échange automatique de renseignements  au niveau international, mais il est nécessaire d’admettre qu’il s’agit de la fin du secret bancaire et le début d’une collaboration, sûrement fructueuse, entre les Etats. Toutefois, certains pays comme le Panama n’ont pas encore fait le choix d’adhérer à cet échange généralisé des renseignements fiscaux, ce qui dès lors, contribue au maintien de quelques paradis fiscaux.

Charlotte POILLIOT

[1] http://www.oecd.org/fr/fiscalite/echange-de-renseignements-fiscaux/

[2] http://www.oecd.org/fr/fiscalite/echange-de-renseignements-fiscaux/accordsdechangederenseignementsfiscauxtieas.htm

[3] http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=celex%3A32014L0107

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