Le maintien de salaire

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Mémoire du Master droit de la protection sociale d’entreprise (2014-2015) par  DION, Morgane et PINS, Justine

Le contrat de travail est un contrat synallagmatique. Le salarié a donc l’obligation de fournir une prestation de travail en contrepartie de laquelle l’employeur va lui verser un salaire. Lorsque le travail n’est pas fourni par le salarié, l’obligation de l’employeur est dépourvue de cause et le salaire n’est plus dû.

Toutefois, dans certains cas et en raison du caractère alimentaire du salaire, le régime général de la sécurité sociale prévoit un maintien de salaire. Des indemnités journalières prévues à l’article L. 321-1 du Code de la sécurité sociale sont ainsi versées par le régime général de la sécurité sociale, et un complément de salaire prévu à l’article L. 1226-1 du Code du travail est dû par l’employeur. Ce dernier article précise que l’indemnisation complémentaire s’applique aux salariés du secteur industriel, du secteur commercial et du secteur agricole. Sont cependant exclus les salariés travaillant à domicile, les salariés saisonniers, les salariés intermittents et les salariés temporaires.

Le maintien de salaire est susceptible de faire intervenir le mécanisme de la subrogation, prévu par l’article R.323-1 du Code de la sécurité sociale.

La subrogation s’opère de plein droit lorsque le salaire est maintenu en totalité. Lorsque le salaire est maintenu sous déduction des indemnités journalières, elle ne joue qu’en cas d’accord du salarié.

Les indemnités complémentaires étant versées sous conditions (I), le maintien de salaire cesse lorsque ces conditions ne sont plus remplies (III). Elles font l’objet d’un calcul particulier (II) et sont soumises à un statut social et à un statut fiscal spécifiques (IV).

I. CONDITIONS DE L’INDEMNISATION COMPLEMENTAIRE

Le bénéfice d’une indemnisation complémentaire à l’allocation journalière versée par la caisse de sécurité sociale au titre des prestations en espèces est subordonné à des conditions, prévues à l’article L. 1226-1 du Code du travail :

  • Le salarié doit être pris en charge par le régime général de la sécurité sociale
  • Le salarié doit justifier par certificat médical et le cas échéant par contre-visite médicale de l’incapacité de travail provoquant l’absence au travail
  • Le salarié doit être soigné sur le territoire français ou dans l’un des États de l’Union européenne ou l’un des États parties à l’accord sur l’Espace économique européen[1].
  • Le salarié doit avoir un an d’ancienneté dans l’entreprise[2]. L’article D. 1226-8 du Code du travail précise que cette ancienneté s’apprécie au premier jour de l’absence.

La jurisprudence a ajouté une condition : le contrat de travail du salarié ne doit pas être suspendu au moment de la maladie du salarié.

Ainsi, dans un arrêt de la Cour de cassation du 31 mai 2012[3], la chambre sociale précise que « le contrôle judiciaire auquel a été soumis le salarié n’ayant eu pour effet que de suspendre ses droits à indemnisation au titre de la garantie de salaire pour cause de maladie, c’est à bon droit que la cour d’appel a retenu que l’intéressé était bien fondé à prétendre au bénéfice de cette garantie ».

Il faut noter que la convention collective peut prévoir des dispositions plus favorables aux salariés.

II. CALCUL DE L’INDEMNITE COMPLEMENTAIRE

L’employeur ne verse l’indemnité complémentaire qu’après un délai de carence (A). Son montant varie en fonction de la durée de l’arrêt de travail (B).

A. DÉLAI DE CARENCE

La garantie de ressources s’applique après un délai de carence de 7 jours et le versement de l’indemnité complémentaire par l’employeur commence ainsi au 8ème jour de l’arrêt maladie : « le délai d’indemnisation court au-delà de sept jours d’absence », d’après l’article D. 1226-3 du Code du travail.

Un délai de carence plus court peut être déterminé par convention collective.

En revanche, il n’y a pas de délai de carence si l’arrêt de travail est consécutif à un accident du travail ou à une maladie professionnelle. Le salarié est alors indemnisé dès le premier jour d’arrêt de travail, d’après l’article D. 1226-3 du Code du travail.

Le délai de carence se calcule en jours calendaires, en tenant compte des jours de repos hebdomadaires[4].

B. DURÉE ET TAUX DE L’INDEMNISATION COMPLEMENTAIRE

La durée et le taux de l’indemnisation complémentaire sont de :

  • 90 % de la rémunération brute les 30 premiers jours,
  • puis, 2/3 de cette même rémunération les 30 jours suivants.

L’article D.1226-2 du Code du travail prévoit que ces durées sont augmentées de 10 jours par tranche de cinq ans d’ancienneté au-delà de la durée d’un an requise pour l’entrée dans le dispositif. La durée maximale de l’indemnisation complémentaire est de 90 jours pour chacune des deux périodes.

Exemple :

  • un salarié ayant entre un an et six ans d’ancienneté percevra 90 % de son salaire brut pendant 30 jours, puis 66,66 % pendant les 30 jours suivants ;
  • un salarié ayant entre six et onze ans d’ancienneté percevra 90 % de son salaire brut pendant 40 jours puis 66,66 % pendant les 40 jours suivants.

III. FIN DU MAINTIEN DE SALAIRE

Dans le cas où les conditions prévues par l’article L.1226-1 du Code du travail ne seraient plus réunies, le maintien de salaire cesse de recevoir application.

C’est le cas :

  • Lorsque l’arrêt de travail n’est plus pris en charge par le régime général de sécurité sociale[5].
  • Lorsque l’arrêt n’est pas justifié par la production du certificat médical requis ou lorsque la prolongation éventuelle de l’arrêt de travail ne fait l’objet d’aucune justification dans les délais.
  • Lorsque, nonobstant les prescriptions du médecin traitant, le salarié refuse de se conformer à la décision des médecins-contrôleurs de la Sécurité sociale[6].
  • Lorsque le salarié est absent ou refuse la contre-visite médicale demandée par l’employeur[7].
  • Lorsque le personnel de l’entreprise est au chômage technique et ne perçoit aucune rémunération, puisque le principe est que la rémunération est celle que le salarié aurait perçue s’il avait travaillé[8]. En revanche, une grève affectant l’entreprise est sans effet sur le maintien du salaire s’il n’est pas établi que la grève a eu pour conséquence d’empêcher toute activité dans l’entreprise[9].

À noter que, l’article D. 1226-4 du Code du travail prévoit que le salarié qui a épuisé ses droits à indemnisation conventionnelle au cours d’une année civile ne peut, s’il n’a pas repris le travail, prétendre à une nouvelle indemnisation, au titre de la même absence, à compter du 1er janvier de l’année suivante[10].

IV. RÉGIME SOCIAL ET FISCAL

Le maintien de salaire par l’employeur fait l’objet d’un régime social (A) et d’un régime fiscal (B) spécifiques.

ARÉGIME SOCIAL

L’article R.242-1 du Code de la sécurité sociale prévoit que les allocations complémentaires aux indemnités journalières sont incluses dans la base des cotisations sociales qu’elles soient versées directement par l’employeur ou pour son compte par l’intermédiaire d’un tiers.

Lorsque le régime de prévoyance est financé par l’employeur et le salarié, les allocations « doivent être incluses dans l’assiette des cotisations selon une proportion correspondant au financement des allocations par l’employeur »[11].

Le complément de salaire est également soumis à la CSG et à la CRDS comme cela a été rappelé dans un arrêt rendu le 7 décembre 2000 par la Chambre sociale de la Cour de cassation[12].

Le complément de salaire étant assimilable à un revenu d’activité[13], les indemnités complémentaires suivent donc le même taux d’assujettissement à la CSG et à la CRDS c’est-à-dire respectivement 7,5% et 0,5%[14].

B. RÉGIME FISCAL

Lorsque les indemnités complémentaires sont versées par un régime de prévoyance, deux cas sont à distinguer[15].

  • Soit le régime de prévoyance complémentaire est obligatoire et les indemnités complémentaires versées sont alors imposables en totalité.
  • Soit le régime de prévoyance complémentaire est à adhésion facultative, et les indemnités complémentaires ne sont alors pas soumises à l’impôt sur le revenu.

[1] Cass. soc., 6 mars 1986, n°83-41.805.

[2] Cass. soc., 7 juill. 1993, n°90-40.906.

[3] Cass. soc., 31 mai 2012, no 10-16.810.

[4] Cass. soc., 1 juill. 1985, n° 83-41.028 et Cass. soc., 26 janv. 2011, no 08-45.204.

[5] Article R. 315-2 CSS.

[6] Cass. soc., 28 nov. 2000, no 98-41.308, Bull. civ. V, no 394.

[7] Cass. soc., 14 janvier 1995, n°2534 D.

[8] Cass. soc., 2 juill. 1987, no 83-43.626.

[9] Cass. soc., 16 juill. 1987, no 85-44.490, Bull. civ. V, p. 316.

[10] Cass. Soc., 28 avr. 1994, n°92-43.394.

[11] Cass. soc., 29 mars 2001, n°99-14.815 et Cass. soc., 21 déc. 2006, n°05-18.690.

[12] Cass. Soc., 7 décembre 2000, n°99-13.173.

[13] Lettre A1 DL/LAE/192/91, 24 avr. 1991 : BJ/UCANSS, n° 24-1 991 et Lettre-circ. ACOSS n° 97-7, 17 janv. 1997.

[14] Article L.136-8 CSS.

[15] BOI-RSA-CHAMP-20-30-20 n° 100.

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