L’interopérabilité des applications de tracing au coeur des discussions européennes

Inspirés par le modèle singapourien pour limiter la propagation du Covid-19, certains États membres ont lancé leurs propres applications de tracing, à l’image de la France avec StopCovid. Plusieurs questions se posent alors, à savoir comment permettre une collaboration effective entre les États, et comment s’assurer du respect des libertés fondamentales.

 Dans sa dernière déclaration du 16 mars 2020, Charles Michel, président du Conseil européen, a donné le ton. Dans un contexte de solidarité accrue entre les États membres et face à la nécessité de protection des populations, il a affirmé son souhait d’encourager « les États membres à collaborer pour prendre certaines mesures destinées à endiguer la propagation du virus ».

La Commission européenne a rendu le 8 avril 2020 une recommandation concernant la création d’une plateforme commune . Elle souligne la nécessité d’une interopérabilité entre les diverses applications nationales, et rappelle que ces dernières doivent respecter les lois européennes en matière de respect de la vie privée, de transparence et de protection concernant le traitement des données.

Tandis que la réouverture des frontières de l’espace Schengen ne devrait pas avoir lieu avant le 15 juin , seul un tel interfonctionnement permettrait « l’assouplissement des mesures de confinement et la levée des restrictions à la libre circulation dans toute l’Union européenne ».

Dans sa recommandation, la Commission dévoile la création d’une « boîte à outils » dotée d’un double objectif : une utilisation paneuropéenne coordonnée des applications mobiles nationales et une approche commune permettant de modéliser et de prévoir l’évolution du virus au moyen de données de localisation mobile anonymisées et agrégées.

Le conditionnement des applications de traçage au respect du RGPD

Si la Commission insiste sur la mise en place d’une collaboration européenne, elle souligne également le besoin de définir au niveau national la finalité de l’application, ainsi que la base juridique permettant sa mise en oeuvre. Les États devront ainsi veiller au respect des libertés fondamentales à leur niveau, alors que l’application hollandaise « Covid19 Alert » a été épinglée pour fuites de sécurité.

En France, la Commission nationale de l’informatique et des libertés a rendu le 25 mai 2020, un avis favorable concernant l’application mobile « Stopcovid ». Elle a estimé « le dispositif conforme au Règlement général sur la protection des données » et a considéré que, constituant une atteinte à la vie privée,  il « n’est admissible qu’à certaines conditions ». Plusieurs recommandations ont ainsi été formulées, dont la mise en place d’un droit d’opposition et d’effacement des données.

De son côté, le Défenseur des droits, Jacques Toubon, s’inquiète quant à l’avenir des données récoltées par l’application, craignant qu’elles ne soient utilisées dans un objectif de fichage des personnes contaminées, pouvant mener à des discriminations.

Adoptée par l’Assemblée nationale le 27 mai dernier, l’application Stopcovid est disponible depuis le 2 juin 2020 et a franchi le cap du premier million d’utilisateurs.

Newal Budak, titulaire du M2 juriste européen des affaires à l’université Paris Nanterre

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