Dans un rapport en 1991, le Comité européen de prévention de la torture faisait état des conditions de détention jugées déplorables dans certains établissements pénitentiaires français. A cet effet, le Comité rappelait que priver une personne de liberté implique que son bien-être soit assuré jusqu’au moment où sa liberté lui soit rendue. Quelques années plus tard, en 2012, le Conseil d’Etat rendait une ordonnance Section française de l’Observatoire International des Prisons et autres, relative aux conditions de détention observées à la prison des Baumettes à Marseille qui avait provoqué un véritable sursaut judiciaire.
I- Hier à Marseille, aujourd’hui à Nîmes, la dignité humaine des détenus semble être de nouveau mise à mal
Bien qu’elles soient dénoncées devant la justice, les conditions de détention n’aboutissent pourtant pas à la prise de mesures concrètes.
Nous avions pour la plupart été interpellés par l’affaire de la prison des Baumettes à l’époque, en pensant qu’on remédierait à de telles entraves aux droits et libertés fondamentaux des personnes détenues, pourtant, véritable choc face aux conditions de détention de la prison de Nîmes. En effet, le 30 Juillet 2015 la plus haute juridiction de l’ordre administratif a statué sur les conditions de détention à la Prison de Nîmes, dans laquelle la situation est plus qu’alarmante puisque les détenus disposent chacun de seulement 1,33 mètres carrés d’espace pour vivre.
La maison d’arrêt de Nîmes qui dispose de seulement 192 places comptait 357 détenus au 1er Juillet 2015. En 2012, à la prison des Baumettes on comptait 1769 détenus pour 1190 places.
D’autant plus que, le Comité Européen de Prévention de la torture indique quelques standards minimaux estimés à 4 mètres carrés par détenu dans un dortoir et 6 mètres carrés par détenu dans une cellule.
II- La Cour Européenne des Droits de l’Homme, une voie de dernier recours
Absence de prise de mesures concrètes ou non recevabilité devant les juridictions internes, nombreux sont les plaignants qui intentent des recours devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme.
Force est de constater que la multiplicité des recours devant les juridictions européennes témoigne de l’inefficacité des juridictions, d’autant plus que celles ci semblent plus soucieuses du respect des droits et libertés fondamentaux des personnes détenues. À cet effet, la règle 18.10 relative aux conditions de détention prévues par les règles pénitentiaires européennes précise que les conditions de logement des détenus doivent satisfaire aux mesures de sécurité les moins restrictives possible.
En l’espace de six mois en 2015, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a condamné deux fois la France en matière de contentieux carcéral. En effet, dans un arrêt Helhal contre France du 19 Février 2015 était en cause la compatibilité entre l’état de santé d’un détenu handicapé et son maintien en détention.
Plus récemment, dans un arrêt Yengo contre France du 21 Mai 2015, la France fut à nouveau condamner pour violation du droit au recours effectif.
Rappelons d’ailleurs que le surpeuplement peut constituer une forme de peine ou traitement inhumain ou dégradant et donc une violation de l’article 3 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales.
La prison est par essence privative de liberté mais elle ne peut en aucun cas être privative de dignité. Alors.. jusqu’où ira – t – on pour punir?
Pour en savoir plus:
– Site legifrance.gouv.fr > Accueil > Recherche simple dans la jurisprudence administrative > Conseil d’Etat, juge des référés, 22/12/2012, 364584, Publié au recueil Lebon
– Site legifrance.gouv.fr > Accueil > Recherche simple dans la jurisprudence administrative > Conseil d’Etat, juge des référés, 30/07/2015, 392043, Publié au recueil Lebon
– CEDH Helhal c/ France – 19 Février 2015 – Requête N°10401/12
– CEDH Yengo c/ France – 21 Mai 2015 – Requête N°50494/12
Asmâa Mahgoub