Cession de titres : garanties indemnitaires ou réduction de prix ?

 

De nombreuses décisions récentes imposent encore de distinguer entre garantie indemnitaire et clause de réduction de prix. En effet, tant la sécurité juridique tenant au traitement fiscal, que l’absence de taxation doivent conduire à opter pour une clause de réduction de prix dans le cadre d’une cession des titres d’une société.

Dichotomie des clauses anticipant la survenance d’un passif latent

L’imagination sans limite, des rédacteurs d’actes de cession de titres de sociétés, a conduit à la naissance d’une multitude de mécanismes de garantie. En ce sens que, les modalités de détermination et de versement des sommes dues sont pléthoriques. Toutefois, le Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts Comptables s’est lui montré plus pragmatique. Ainsi le Plan comptable général ne connaît que deux types de clauses : les garanties indemnitaires et les réductions de prix.

D’un coté, la clause de réduction de prix permet au cédant de consentir à l’acheteur une réduction du prix initial pour tenir compte de la révélation d’un élément de passif dont les parties n’avaient pas connaissance au jour de la cession. De l’autre, dans la clause de garantie proprement dite, l’imagination des parties, et de leurs conseils, peut donner toute sa mesure, et la pratique révèle une grande variété de stipulations, qui se ramènent à trois types :

  • Le cédant désintéresse directement les créanciers sociaux dont la créance s’est révélée postérieurement à l’acquisition, mais trouve sa cause antérieurement ;
  • Le cédant met à la disposition de la société les sommes nécessaires pour combler ce passif ;
  • Le cédant indemnise le cessionnaire du montant du passif imprévu ; ce dernier cas de figure est plus rare, car il présente l’inconvénient de ne pas conduire directement au comblement du passif révélé.

Cette dichotomie comptable se retrouve dans le traitement fiscal. Et à ce titre il convient de bien distinguer les deux mécanismes aux modalités d’imposition totalement différentes.

La réduction de prix comme solution fiscale idoine

Ainsi en principe, les sommes versées à l’acquéreur d’un actif, en application d’une clause de garantie de passif, constituent un produit imposable et non une minoration du prix de revient de cet actif[1]. Or, par souci de neutralité fiscale, l’indemnité suit un régime de taxation analogue à celui de la dépense ou la charge qu’elle a pour objet de compenser[2].Par conséquent, l’indemnité, versée dans le cadre d’une obligation contractuelle de réparer, ne constitue un produit imposable  que si elle est génératrice d’une plus-value, ou si elle compense une charge déductible, ou si elle est versée en remplacement de recettes taxables[3].

De son coté la clause de réduction de prix induit d’une part, une diminution de la dette ou augmentation de trésorerie et d’autre part, une diminution de la valeur d’inscription[4]de l’actif au bilan de la société afin que celle-ci corresponde à son coût d’acquisition[5], c’est-à-dire au prix d’achat majoré des coûts directement attribuables à la préparation de cet actif en vue de l’utilisation envisagée[6]. Dès lors, la mise en œuvre d’une clause de réduction du prix d’acquisition n’entraine aucune variation d’actif net. Par conséquent, une telle stipulation contractuelle n’entrainera aucune taxation.

Exemple :

Clause de réduction de prix

Clause de garantie indemnitaire

Prix initial des actions de F 1 000 000 €
Inscription des actions de F au bilan de A Titres de participation F = 1 000 000 €

Dette de A envers F = 1 000 000 €

Condamnation de F à une amende

300 000 €

Conséquences chez A

Titres de participation = 700 000 €

Dette de A envers F = 700 000 €

A reçoit une indemnité taxable de 300 000€ en exécution de la clause

 

Dès lors, le recours à la clause de réduction de prix doit être privilégié en raison de la neutralité ainsi que de la sécurité inhérente à son traitement fiscal.

 

Ugo Vianez

[1] CE 24-06-2013 n°350451

[2] M. Martin commissaire du gouvernement CE 5/10/1988  n°80823

[3] O.SCHRAMECK commissaire du gouvernement CE 12/03/1982 n°17074

[4] BOI-BIC-CHG-20-20-10 n° 10 publié le 23/09/2012 et BOI-BIC-PVMV-40-40-20 n°210 publié le 11/03/2013

[5] Article L213-1 du PCG sur renvoie de l’article L221-1 du PCG

[6] Article 213-22 du PCG

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