Legal start-up: quels impacts sur le marché de la prestation juridique ?

La digitalisation de la société a entrainé une évolution de la pratique des professions judiciaires: Réseau privé virtuel des avocats (RPVA), veille juridique en ligne, automatisation de la production des actes juridiques, sont autant de nouvelles techniques que la plupart des acteurs du droit pratiquent quotidiennement, et particulièrement les avocats.

Cette transition technologique s’est réalisée de concert avec une révolution dans la conception du contentieux juridique. Désormais, l’avocat n’a plus le monopole sur le marché de la prestation juridique, de nouveaux acteurs sont apparus, les « legal start-up ». Ces entreprises, centrant leur activité sur la matière juridique, sont autant d’opportunités intéressantes que de potentiels acteurs concurrentiels sur le marché du juridique.
Il s’agira ici de faire un point, le plus objectif possible, sur les évolutions positives et négatives que l’apparition des « legal start up » va entrainer.

 

L’évolution du marché du contentieux juridique : l’apparition des « legal start-up »

Certains les appellent les « start-up du droit », d’autres, plus critiques, les surnomment « les loups du droit » (Affiches parisiennes). Il s’agit de sociétés proposant d’assister des personnes confrontées à des problématiques juridiques, que ce soit dans le cadre d’un litige ou non .

En réalité, le fonctionnement de ces sociétés est extrêmement simple, il s’agit d’automatiser informatiquement le traitement de certains contentieux. Le client remplit un formulaire en ligne. Grâce aux données récupérées, un logiciel adapte des actes-types au cas dont il est question.

Il peut s’agir dans certains cas de produire des actes juridiques tels que des statuts de sociétés.

Il peut s’agir aussi de régler des litiges de faible importance, notamment ceux relatifs aux problèmes de voisinage. Dans ces derniers cas, le ministère d’avocat n’est, en général, pas obligatoire. Dès lors, rien n’empêche un justiciable de se faire assister par une société spécialisée (on retrouve notamment la société Demandez Justice).

Ces nouvelles start-up présentent des avantages : rendre le droit plus abordable et permettre à des justiciables d’engager aisément une procédure judiciaire.

En cela, ils participent sans aucun doute à une « judiciarisation » des rapports sociaux, ce qui n’est pas nécessairement une bonne nouvelle.

Ces sociétés ne sont en effet pas sans dangers.

Tout d’abord, les sociétés en question ne présentent pas les mêmes garanties que les avocats.

Par exemple, aucune condition de formation n’existe à l’égard des personnes proposant de telles prestations. L’engagement d’une procédure judiciaire doit pourtant être muri, fondé juridiquement, tenir compte des problèmes de compétence, de prescription, autant d’éléments d’achoppement qui peuvent faire défaut dans le cadre d’un traitement automatisé.
Ensuite, les avocats sont soumis à l’obligation légale de souscrire une assurance de responsabilité civile professionnelle permettant de couvrir un certain nombre de risques inhérents à l’exercice normal de la profession d’avocat. Cette assurance constitue une garantie autant pour l’avocat que pour le client, qui, en cas de problème, a beaucoup plus de chance d’obtenir une indemnisation.

Un autre problème existe, celui de la collecte des données personnelles. Les avocats sont soumis à une obligation de confidentialité qui fait obstacle à ce que les données collectées fassent l’objet d’une exploitation quelconque. Ce n’est pas le cas des sociétés proposant des services juridiques. Celles-ci sont placées dans la même situation que des sociétés comme Amazon ou Google, pour lesquelles l’exploitation des données personnelles dépend très étroitement des conditions générales de vente.

On comprend donc assez aisément que les « Legal start-up » agissent dans un cadre juridique beaucoup moins strict que celui des avocats, aux dépens hélas du « consommateur », et le mot est choisi à dessein.

Néanmoins, si celles-ci se présentent comme des « Loups du droit » face à l’activité des avocats, elles peuvent également constituer de véritables opportunités pour les avocats (gain de temps, efficacité).

 

La mutualisation des compétences des acteurs du droit

On constate qu’il existe une véritable opposition entre les avocats et les nouvelles entreprises juridiques innovantes. Cette opposition n’est peut-être pourtant pas inéluctable.

En réalité, ces différents acteurs peuvent travailler ensemble afin de mutualiser leurs compétences. Il s’agira ici de s’intéresser succinctement à chaque étape pour voir comment les « legal start up » pourraient permettre de rendre l’exercice de la profession d’avocat plus dynamique.

 

L’existence de nouveaux services de mise en relation des avocats et des clients

Parmi les « legal start-up », on retrouve des services de mise en relation entre clients et  avocats (voir  notamment la société Legal up). Il s’agirait de rechercher, selon leurs spécialités, les avocats compétents dans une même région, et éventuellement permettre une prise de rendez-vous en ligne.

Ce genre de services permettrait de diminuer le temps consacré à la prise de rendez-vous et peut-être de mieux cibler les clients.

 

La constitution de dossiers à distance via le cloud

Une fois le rendez-vous fixé, rien ne sert de se présenter chez l’avocat avec des documents pléthoriques, qui pourront s’avérer peu pertinents, voire inutiles.

Pour cette raison, les avocats ont sans doute intérêt à faire appel à un prestataire web extérieur afin de mettre en place un service de constitution de dossier à distance dans le cadre duquel le client n’aurait plus qu’à télécharger ses fichiers sur le site internet du cabinet d’avocats.

Cela constitue une économie en termes de temps et de coûts d’impression.

 

L’automatisation des recherches juridiques et de la rédaction des actes juridiques

Au-delà de la mise en relation et de la constitution des dossiers, le cœur du métier d’avocat va changer.

Désormais, les recherches juridiques vont être simplifiées, certaines sociétés proposent la mise à disposition de fonds de documentation extrêmement riches, couplés avec des outils de recherche de plus en plus précis (Mon code juridique, Alinéa by Luxia, Doctrine.fr, Captaincontrat)

En ce qui concerne la rédaction automatisée d’actes juridiques, il ne s’agit pas d’une technologie avancée dont seules les « legal start-up » bénéficieraient.

Ces outils sont à la portée de chaque cabinet d’avocats, dès lors que ces derniers détiennent les logiciels Word et Excel. Il s’agit de la fonction de publipostage : des tutoriels en ligne sont disponibles (voir notamment ici ).

En définitive, l’apparition des « legal start-up » peut, à condition d’en faire bon usage, constituer une opportunité pour les avocats : l’objectif étant de gagner du temps afin de se concentrer sur la qualité de la relation avec les clients et les enjeux juridiques de fond.

 

 

Hugo FORT – étudiant Université Lille 2

Charles Drapeau – Avocat au barreau de Lille

avocats-famille-patrimoine.fr

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