Les candidats #4 : Gordon-Krief-Flichy

Pourquoi avoir formé ce binôme ?

Hubert Flichy : L’envie d’être candidat au bâtonnat de Paris a commencé à émerger lors des dernières élections. David avait la même envie que moi à l’époque. Nous avions beaucoup d’idées communes donc nous avons décidé d’y aller ensemble. Etre vice-bâtonnier plutôt que bâtonnier n’a pas d’importance à mes yeux car la seule chose qui m’importe est de pouvoir participer activement à la prospérité et la bienfaisance de notre profession. L’idée d’être « numéro 2 » n’est pas un problème pour moi.

David Gordon-Krief : Le choix de ce binôme est avant tout un choix d’équilibre. Pour ma part, je désirais réellement me présenter avec quelqu’un d’action. Hubert a cette capacité incroyable à fédérer les gens autour de divers projets. C’est également un véritable entrepreneur qui rappelons le, est parvenu en 15 ans à créer un cabinet d’avocats dénombrant aujourd’hui plus de 70 avocats avec une majorité de femmes associées. Nous avons un profond respect l’un envers l’autre. Nous ne sommes pas du tout en concurrence tous les deux, que cela soit pour ce mandat ou dans nos carrières respectives. Cela contribue nécessairement à la bonne réussite de notre projet commun.

 

 

Quels sont les trois points de votre programme que vous voudriez que l’on retienne ?

HF & DGK: Plutôt que 3 points, ce sont d’avantage 3 niveaux que nous aimerions valoriser.

Une gouvernance locale et nationale: Cela peut paraître anodin comme rappel mais le bâtonnier de Paris n’est pas le bâtonnier de toute la France. A ce titre, il ne peut prendre la parole au nom de tous les avocats de France. Le Conseil National des Barreaux (CNB) est l’instance représentant l’ensemble des avocats exerçant en France et le rapprochement des barreaux de France pour une unité plus affirmée est également l’une de nos priorités.

Il est indispensable par ailleurs de renforcer les pouvoirs du Conseil de l’Ordre et son action pour les confrères en mettant en place des outils tels que le rescrit déontologique et la Maison des services partagée et connectée.

Un ordre conquérant: Le marché du droit a fortement évolué ces dernières années c’est pourquoi nous voulons poursuivre la modernisation de l’ordre. L’émergence de « pépinières » de cabinets d’avocats est une bonne chose et nous aimerions les encourager par la labellisation de ces locaux comme « conformes à la profession et respectant l’égalité et la diversité ». En effet, le métier d’avocat nécessite des précautions particulières pour assurer le secret professionnel. De même, nous souhaitons faire du droit un véritable moteur de développement. Les avocats peuvent créer cette richesse. Pour ceci, il nous faut prospecter de nouveaux domaines d’activité, comme cela pourrait être le cas de la RSE et de la Compliance, afin intégrer ces marchés. La conquête passera également par la mise en place et l’encadrement des procédures alternatives de règlements des conflits. La création du Centre national d’arbitrage du travail en sera la première pierre.

Renforcer la solidarité : Durant notre mandat nous voulons encourager le pro-bono. Notre action au service des usagers sera renforcée par le développement du Barreau de Paris Solidarité et la mise en place plus régulière de bus de la solidarité. Nous désirons également accroître les activités pro-bono au sein de notre Barreau avec notre initiative des « seniors du pro-bono ». L’idée est de solliciter des avocats à la retraite pour venir en aide aux avocats momentanément empêchés comme par exemple dans le cas d’une hospitalisation. Nous avons déjà reçu de nombreux accueils favorables de la part des seniors qui se disent prêt à donner de leur temps pour aider leurs confrères en difficulté. Qu’importe l’issue de cette élection, nous mettrons en place ce projet.

 

Avez-vous un projet pour la formation des avocats en général ?

HF & DGK: L’un des points principaux de notre programme est de mettre en place une formation qui corresponde réellement aux besoins des jeunes avocats. Afin d’entamer ce chantier, il est pour nous primordial d’aller à la rencontre des jeunes pour recueillir leurs avis et recommandations. La période de 6 mois de cours à l’EFB est beaucoup trop longue. Les cours pourraient largement être condensés pour permettre aux étudiants d’acquérir encore davantage d’expérience professionnelle. En tant que professionnels, nous connaissons également les attentes du marché et remarquons encore une inadéquation entre la formation et la réalité de l’emploi. C’est ce que nous voulons faire changer.

 

Les avocats sont-ils trop nombreux ?

HF & DGK: La paupérisation de notre profession est certaine. Néanmoins, nous ne pensons pas que cela soit dû au nombre d’avocats. Il n’y a pas trop d’avocats en France et l’instauration d’un numerus clausus n’aurait aucun sens. Le rapport avocat/population est bien moins élevé en France que dans les autres pays européens. Il faut donc étendre le marché du droit. C’est ce que nous voulons faire avec notre Ordre conquérant. Savez-vous qu’aujourd’hui encore près de 50% de la population n’a pas accès au droit ? Pourtant, lorsque l’on écoute les problèmes rencontrés par la population, une très grande majorité d’entre eux peut se régler par le droit. L’avocat est encore trop souvent perçu comme la personne à appeler en cas de problème. Nous devons renforcer notre place de conseil et donc conquérir les nouveaux marchés qui s’offrent aux avocats.

 

Quel bilan tireriez-vous des années Pierre-Olivier Sur ?

DGK: Depuis le début de notre campagne nous avons annoncé vouloir nous positionner dans la continuité du travail de Pierre-Olivier Sur et Laurent Martinet. Certains plans d’action de ce binôme peuvent largement être félicités. Néanmoins, le chamboulement du calendrier des élections, initialement mis en place pour simplifier les élections à l’ordre n’aurait pas dû être applicable pour ces élections. Quand nous nous sommes engagés sur la campagne en février 2013, les futures élections devaient avoir lieu en novembre 2014. Par la suite, le bâtonnier et le vice bâtonnier ont souhaité modifier le calendrier électoral en imaginant même supprimer le dauphinat[1]. Les élections ont ensuite été fixées en novembre 2015 au lieu de novembre 2014 ! Rajouter un an de campagne aux candidats représente un investissement personnel et professionnel considérable auquel nous n’étions pas préparés. Fort heureusement il y a eu un léger retour en arrière avec une fixation de la date d’élection les 23 et 25 juin 2015. Le dauphinat est donc maintenu mais pour une durée de 6 mois.

Cette modification du calendrier électoral est également bien serviable à Laurent Martinet qui a décidé de se présenter en tant que bâtonnier. Le texte précise que le bâtonnier et le vice-bâtonnier ne peuvent se présenter à leur propre succession. Laurent Martinet a donc interprété cela comme une possibilité pour lui de se présenter en tant que bâtonnier car il n’était que vice-bâtonnier. C’était tellement logique que le croisement des deux candidatures n’était pas possible non plus (le bâtonnier candidat au vice bâtonnat ou l’inverse) que le texte n’avait rien précisé. Cette candidature est « ridicule » car, en plus de poser un problème simple d’égalité des candidats devant les élections, en cas d’élection il sera à la fois vice-bâtonnier et bâtonnier désigné… Cela ressemble tout de même grandement à la mise en place d’une monarchie institutionnelle ! Quand on se porte garant de la démocratie, la première règle à respecter est simple : on ne s’applique jamais une réforme à soi-même. Le vice-bâtonnier ne semble malheureusement pas s’en préoccuper. A coté de ça, il s’agit d’un homme sympathique et travailleur.

Toutes ces polémiques nous ont fait perdre du temps alors que des sujets d’une extrême importance, comme la protection de notre périmètre, la réforme de la CNBF, le secret des affaires et la loi renseignement, étaient en train de se jouer pour la profession.

 

En parlant de la loi renseignement, quelle est votre position dessus ?

HF & DGK: Cette loi nous consterne profondément. Si la loi est adoptée, une autorité administrative pourra sans contrôle mettre n’importe quel citoyen sur écoute. Il s’agit d’une régression absolue car nous voyons une remise en cause totale de notre liberté en tant que citoyen mais aussi en tant qu’avocat au regard de notre secret professionnel qui ne sera plus réellement garanti. Le crime doit être appréhendé, tout le monde s’accorde facilement sur ce point mais parviendrons-nous à le résoudre en amoindrissant les droits de la défense ?

 

Laura Lizé

 

[1] Le Dauphinat permettait jusqu’alors aux nouveaux élus de collaborer avec la bâtonnier et le vice-bâtonnier (toujours en place) pendant 1 an afin d’assurer la continuité des projets une fois leur prise de fonction effective.

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