Les cliniques juridiques : quand le pro bono s’invite chez les étudiants

 

Largement répandues dans les pays Anglo-saxons, les law clinic permettent aux étudiants, de mettre en pratique leur savoir au profit du justiciable en difficulté. Elles s’inspirent notamment du pro bono pratiqué par les professionnels du droit, qui sans contrepartie financière, fournissent des conseils juridiques, dans le but d’améliorer l’accès à la justice. Depuis peu, cette activité se développe en France et s’invite sur les bancs universitaires. Sous la houlette de professeurs de droit et de professionnels du monde juridique, les étudiants répondent aux besoins de justiciables confrontés à une question de droit.

Un complément de formation et un vecteur de motivation

L’activité clinique dans les universités revêt une double vocation pédagogique et sociale. Il s’agit de former différemment les étudiants en leur offrant la possibilité de travailler sur des cas réels. Généralement accessible aux étudiants à partir de la 2e année de licence, la clinique juridique devient dans certains établissements, un crédit européen (ECTS). Dès lors, elle participe, au même titre que les autres enseignements plus théoriques, à l’obtention de sa Licence de droit La volonté de proposer aux étudiants cette expérience, résulte du fossé qu’il existe entre la pratique et la théorie enseignée.Les concepts juridiques assimilés par la pratique en clinique juridique, constituent un meilleur apprentissage du droit, et l’enseignement prodigué répond aux exigences attendues par les professionnels.

Florian, clinicien à l’école HEAD,  dont la particularité est de s’adresser aux entrepreneurs, nous confie qu’il a tenté cette expérience basée sur le pro bono pour acquérir une expérience concrète : « Ce bénévolat juridique permet de traiter des cas réels ce qui est une véritable chance à notre niveau ». Cependant, la participation à une clinique juridique ne doit pas être perçue comme un stage, mais plutôt comme un incubateur de talents au sein de l’université. « Cela nous amène à nous poser les bonnes questions, à nous confronter à des problèmes juridiques concrets, en marge de nos cours théoriques » affirment Robin et Irène, cliniciens du droit à l’université de Saint-Denis. Leur camarade Clément ajoute que « c’est une pépite sur un CV. Dans la formation théorique, on n’est pas formés à écouter les gens et à poser des questions. Là, on apprend ça à toute vitesse »

En effet, nombre d’entre eux ont remarqué que leurs candidatures à des stages retenaient plus l’attention des recruteurs depuis qu’ils faisaient partie de la clinique : « depuis, que j’ai ajouté cette expérience sur mon CV, les cabinets d’avocats ne regardent plus ma candidature de la même manière », assure Irène. Au-delà de l’aspect pratique des cliniques, la dimension sociale prend également toute la place. Les principes de probité et d’humanité prennent tout leurs sens pour ces avocats en herbe pour qui « c’est stimulant de se sentir utile » comme le précise Laura, 21 ans.

La clinique juridique, comment ça marche ?

Les étudiants cliniciens, sous le tutorat de leurs enseignants et d’avocats volontaires, établissent dans un premier temps des diagnostics juridiques aux problématiques qui leurs sont présentées, puis, dans un second temps, ils proposent des moyens d’action. Lorsque des dossiers se présentent à eux, ils les abordent comme le ferait un avocat : ils se penchent sur le problème de droit de sorte à proposer une solution au justiciable. « Nous ne prodiguons jamais de conseil immédiat. Lors du premier rendez-vous, nous notons tous les détails du problème et nous travaillons aux solutions plusieurs jours », explique Robin.

Même schéma pour la clinique HEAD, « nous accusons réception de la demande dans la journée. Ensuite, dans la semaine, nous essayons d’organiser un rendez-vous avec l’entrepreneur, pour avoir une approche plus concrète de son problème » nous explique Florian. Dans leur clinique, Florian et ses camarades s’attachent à dépasser l’aspect purement juridique et d’avoir démarche orientée business afin de mieux comprendre les besoins de leur entreprise. Par ailleurs, lorsque les questions juridiques posées ne nécessitent pas le recours à un avocat, des réponses précises correspondant à la situation de chaque personne sont apportées. Les dossiers traités sont supervisés par un enseignant ou un professionnel du droit, dans le but de garantir la pertinence et l’exhaustivité des réponses.

Cependant, le manque de pratique  des étudiants ne leur permet pas d’appréhender tous les dossiers qui se présentent à eux. Les cas de figure jugés trop complexes, graves ou urgents peuvent être refusés et redirigés vers un professionnel habilités. « Les étudiants n’interviennent que lorsque la personne n’a pas d’avocat. En cas de problématiques lourdes, comme une personne victime de violences, ils se contenteront de lui expliquer les démarches et de donner les horaires de consultations du barreau concerné », ajoute Me Pitcho, avocat superviseur à la clinique de Saint-Denis Ainsi, l’objectif poursuivi par les cliniques est triple : il permet aux étudiants de constituer une application directe et immédiate de leurs enseignements, il leur donne un aperçu du métier d’avocat, et il répond à un besoin grandissant d’information juridique.

Recensement des cliniques juridiques sur le territoire français

Le phénomène se démocratisant progressivement, il devient monnaie courante de voir fleurir les cliniques sur les campus universitaires et écoles de droit. Nombres d’entre elles prodiguent des conseils juridiques portant sur le droit général. Les problématiques sont larges et peuvent alors relever tant du droit de la famille que du droit administratif. Certaines, sont spécialisées dans diverses branches du droit, comme c’est le cas pour l’école HEAD, qui traite des problématiques relevant du droit des affaires. D’autres, abordent des sujets plus spécifiques tels que l’environnement ou les libertés fondamentales, et s’adressent plus généralement à des organisations non gouvernementales.

Panel des diverses cliniques juridiques en France :

Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne  

Université de Paris 2 Assas

Université de Paris 5 Descartes

Université de Paris 8 Vincennes, Saint-Denis

Université de Paris 9 Dauphine

Université de Paris 10 Paris Ouest Nanterre

Université de Saint-Quentin en Yvelines : clinique du droit de l’environnement

Institut d’Etudes Politiques de Paris

Ecole de Formation des Barreaux à la cour d’appel de Paris (EFB)

Hautes Etudes Appliques du Droit (HEAD)

Hautes Etudes Commerciales (HEC Paris)

Université de Bordeaux Montesquieu

Université de Caen, basse Normandie

Université de Tours François Rabelais  

Université de Grenoble et l’association Etujuris

Université Aix-Marseille : clinique juridique de l’environnement

Clinique des droits de l’Homme de Strasbourg

 

Pour en savoir plus

Cheherazade CHIKHI

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.