Maladie de Lyme : une nouvelle plainte, contre X

La maladie de Lyme est une maladie infectieuse dont le diagnostic est souvent difficile. Or le test utilisé pour dépister la maladie est remis en cause. Engager la responsabilité pénale des autorités sanitaires au sens large, qui ont agréé la commercialisation de ce test jugé fiable, tel est le but et l’ambition de cette nouvelle action judiciaire.

La maladie de Lyme est une infection bactérienne de type Borrelia transmise à l’homme par la piqûre de tiques. L’évolution de la maladie est décomposée en trois phases dont la durée est variable d’un individu à un autre.

Il s’agit d’abord de l’apparition d’une lésion cutanée provoquée par la piqûre de la tique appelée érythème migrant. Cette dernière est initialement de la taille d’une piqûre de moustique mais peut s’étendre à dix centimètres de diamètre. A ce stade, les symptômes sont : des maux de tête, de la fièvre, des frissons et des douleurs articulaires et musculaires. Toutefois, dans un certain nombre de cas la personne ne s’en rend pas compte. La première phase de la maladie peut être asymptomatique. Il se peut aussi que la personne ne s’en aperçoive pas, c’est le cas lorsque la piqûre est au niveau du cuir chevelu.

Ensuite viennent les phases deux et trois, qui sont beaucoup plus invasives. La deuxième phase de l’évolution de la maladie survient de quelques semaines à quelques mois après la piqûre. Globalement apparaît un état de fatigue généralisé associé à d’autres symptômes comme des douleurs articulaires, des atteintes neurologiques avec des maux de tête qui se traduisent par des méningites, voire des paralysies faciales.

La dernière phase de la maladie est la plus critique, la personne souffre des symptômes énoncés dans la deuxième phase de façon chronique et qui s’aggraveront dans le temps. En l’absence de traitement plusieurs organes pourront être touchés, et entrainer à terme des handicaps physiques et mentaux graves.

La maladie se soigne par la prise d’antibiotiques. Or, plus un traitement antibiotique est débuté tôt moins le malade à de risques de conserver des séquelles. Toutefois, le diagnostic de cette maladie est difficile à établir, et le test de dépistage apparaît peu satisfaisant, laissant les patients dans l’errance médicale.

Après avoir agi par une action collective en responsabilité civile, les victimes de cette maladie ont par la voie de leurs avocats entamé une action pénale (I), l’objectif à terme est de remplacer le test existant pour le substituer à un autre plus performant (II).

I- Une nouvelle procédure, en complément de l’action civile, l’action pénale

Le 15 février 2018, une plainte contre X a été déposée par une soixantaine de personnes (1) auprès du parquet de Paris. Cette plainte vise au sens large la responsabilité des autorités sanitaires. 

Les avocats des plaignants, Maîtres Catherine Faivre et Julien Fouray ont notamment dans leurs viseurs le Centre National de Référence (CNR) des Borréliose de Strasbourg (2) ainsi que son directeur ou encore la responsabilité de l’Autorité nationale de sécurité du médicament (ANSM). Soit tous les organismes de santé publique parties prenantes dans la validation des tests de dépistages de la maladie de Lyme, test sanguin dont la fiabilité est remise en cause.

Les motifs de la plainte sont ;

  • « violation du principe d’indépendance des experts,
  • constitution d’abus de bien social et recel,
  • corruption active/passive ou voie de fait pour obtenir un certificat inexact,
  • trafic d’influence passif par une personne exerçant une mission de service public et recel,
  • mise en danger délibérée d’autrui et blessures involontaires »

L’objectif de la plainte est de permettre d’expliquer les liens qui se seraient développés entre le CNR et son directeur avec les laboratoires fabricants des tests de dépistage.  Les avocats énoncent que cette collusion aurait permis aux laboratoires de « contourner les procédures de contrôle et d’intégrer en qualité d’expert le groupe de travail élaborant le nouveau Protocole national de diagnostic et de soin (PNDS) dans le cadre du plan national de lutte contre la maladie de Lyme ». Enfin, il s’agit d’établir la responsabilité pour manquement aux obligations de prudence et de sécurité de l‘ANSM au préjudice des usagers des tests, des malades. 

Précédemment à cette plainte, une action en responsabilité civile a été entamée  à l’encontre de cinq laboratoires pharmaceutiques (3) par 300 plaignants afin d’obtenir des dommages et intérêts. Ces laboratoires sont accusés de ne pas avoir suffisamment informés le public sur le manque de fiabilité des tests de diagnostics qu’ils commercialisent. A ce jour, la procédure est toujours en cours.

II- Un mode de dépistage contesté, le test ELISA

Le test litigieux en question est le test ELISA (4). Ce test est utilisé comme référence en médecine humaine, toutefois un certain nombre de patriciens estime qu’il ne permettrait de détecter qu’à peine la moitié des malades. Or, en l’absence de dépistages, les malades sont exclus du protocole de soins.  Le Haut Conseil de la santé publique a d’ailleurs reconnu que les « sérodiagnostics français n’étaient pas assez sensibles et que les tests commercialisés devraient faire l’objet d’études de performances » (5).

Le Professeur Christian Perronne, chef du service infectiologie de l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches énonce que des alternatives à ce test pourraient être mises en place. Il s’agirait d’isoler le microbe en cause, la bactérie Borrelia ou autres parasites que la tique transmet lors d’une piqûre. Une fois isolée, il s’agit d’amplifier les gènes de la bactérie par une technique appelée PCR (6) qui est déjà utilisée dans les laboratoires vétérinaires. Cependant, à ce jour, les laboratoires se sont toujours opposés à la mise en place de cette technique pour la médecine humaine.

 

Arnaud STEVENS

 

 

 

(1) A terme les avocats espèrent réunir environs 300 plaignants comme pour l’action en responsabilité civile

(2) Les centres nationaux de référence ont un rôle d’expertise, de conseil, de surveillance épidémiologique et d’alerte en matière de santé publique

(3) Les laboratoires DiaSorin, BioMérieux, Siemens, Euroimmun et Bio-Rad

(4) A ce jour, la maladie de Lyme est dépistée par le test ELISA (de l’anglais enzyme-linked immunosorbent assay, littéralement « dosage d’immunoabsorption par enzyme liée ») qui est un dépistage par la technique d’immunofluorescence indirecte, réalisé sur un échantillon sanguin ou par ponction lombaire. Si le test est négatif, un nouveau est réalisé 15 jours plus tard pour confirmer.  Si le test est douteux ou positif, alors un second test appelé test Western bolt est effectué, pour confirmer le diagnostic

(5) Avis relatif à la borréliose de Lyme, Haut Conseil de la santé publique, 28 mars 2014

(6) La PCR (Polymerase Chain Reaction) est une méthode de détection directe du génome des agents infectieux, ou parasitaires par amplification enzymatique d’une partie de celui-ci. Cet outil de biologie moléculaire est très spécifique et permet de détecter de façon reproductible de très faibles quantités d’agents pathogènes dans des prélèvements de nature variée. Définition donnée par le laboratoire vétérinaire Scanelis.

 

 

 

 

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