Le PACS en Italie

L’Italie était, jusqu’en 2016, le dernier pays d’Europe occidentale à ne reconnaître aucun statut aux couples de même sexe. Ce n’est que depuis le 11 mai 2016 qu’une loi met en œuvre l’union civile pour lesdits couples. Après des mois de débats et d’oppositions, tant au sein de la classe politique qu’au sein même de la population, l’Italie a imité ses voisins européens.

Dans le Code civil italien, le chapitre IV du Titre VI relatif aux « Droits et devoirs réciproques des époux, l’article 143 dispose qu’ « Avec le mariage, le mari et à la femme acquièrent les mêmes droits et assument les mêmes devoirs ».

Mais qu’en est-il des couples de même sexe ?

En France, c’est depuis 1999 que le PACS (Pacte Civil de Solidarité) prévoit l’union civile (articles 515-1 et suivants du Code civil) pour les couples homosexuels, tendant alors à atténuer l’inégalité certaine qui existait à la fin du XXème siècle. Cette lutte contre l’inégalité s’est récemment achevée par la loi Taubira, qui permit d’offrir au plus grand nombre la possibilité de se marier : c’est la consécration du mariage pour tous.

Comment l’Italie a-t-elle permis l’union civile aux couples de même sexe ?

I/ Une évolution au profit des couples italiens de même sexe

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a appelé mardi 21 juillet 2015 l’Italie à créer un statut juridique pour les partenaires de même sexe dans un jugement[1] qui condamne le pays pour atteinte au droit au respect de la vie privée de trois couples homosexuels. En raison de ces menaces, et en l’absence de loi spécifique, le tribunal des mineurs de Rome avait permis, dans un arrêt du 29 avril 2014, à un membre d’un couple homosexuel d’adopter l’enfant de son partenaire. S’ensuivit le projet de loi de Monica Cirinnà, sénatrice du Parti Démocratique. Celui-ci prévoit d’établir l’union civile pour les couples homosexuels. Le texte Cirinnà semblait même plus progressiste que le PACS français : il devait permettre l’adoption de l’enfant du partenaire de l’enfant légitime du conjoint consacrant alors la jurisprudence, ainsi que l’obligation de fidélité au sein du couple alors que ce devoir n’est spécifique qu’au mariage en France.

Samedi 30 janvier 2016, près d’un million de manifestants se rendirent au « Family Day », menés par Angelino Alfano (actuel ministre de l’Intérieur), à Rome, pour exprimer l’opposition des italiens contre ce projet de loi.

Malgré cette hostilité populaire, le gouvernement italien a engagé, jeudi 25 février, sa responsabilité devant le Sénat. Un amendement permit de modifier le projet de loi de départ, il fut adopté par 173 voix contre 71 – évitant la démission certaine du gouvernement.
En raison des avis émis par l’aile catholique du Parti Démocrate (PD), la possibilité pour un partenaire d’adopter l’enfant légitime de l’autre partenaire fut retirée.
Aussi, fut-il reconnu que l’obligation de fidélité ne devait être réservée qu’au couple de mariés (donc hétérosexuels). Cette modification est la conséquence de l’opposition entre le PD et le centre-droite (Nuovo Centro Destro) issu de l’ancien parti « Forza Italia » -qui avait pour leader emblématique Berlusconi. Le compromis fut alors trouvé dans le but d’assurer la stabilité du gouvernement. Cet amendement établit notamment l’obligation d’assistance morale réciproque, la possibilité de prendre le nom de son conjoint, le droit de visite à l’hôpital, le titre de séjour pour le conjoint étranger, la pension de réversion etc.
Ce projet de loi doit, alors, passer devant la chambre des députés et doit, s’il fait l’objet d’une quelconque modification, retourner devant le Sénat.

II/ L’Italie, sur la voie du modèle français?

Il convient de rappeler ce que permet actuellement notre PACS.

Ses créateurs voulaient tout d’abord concevoir ledit Pacte comme un contrat dans le but de régler la vie patrimoniale des partenaires. Il produit peu d’incidences d’un point de vue personnel (contrairement au devoir de fidélité dans le projet de loi italien !) et n’a pas d’effet particulier sur les règles de filiation, d’adoption ou relatifs à l’autorité parentale. Il n’y a donc pas d’allusion aux enfants, cette union n’étant pas conçue avec la finalité de filiation.

Néanmoins des similitudes existent. Tout comme le PACS italien, l’obtention plus rapide d’un titre de séjour est prévue. Une aide matérielle et une assistance réciproque est présente, et renvoit au droit de visite qu’envisagent nos voisins transalpins.

En 2007, le chef du gouvernement italien, Matteo Renzi participa à Rome, à une manifestation extrêmement importante visant à lutter contre un précédent projet d’union civile, le Dico (droits et devoirs des personnes vivant de manière stable en concubinage). D’autres projets ont connu le même sort : ni le « contrat d’union solidaire » (CUS), ni les « droits et devoirs de réciprocité entre concubins » (DiDoRe), proposé par Berlusconi en 2008, n’ont pu voir le jour. Le projet du DiDoRe de Renato Brunetta, alors ministre de la fonction publique, l’avait amené à exprimer le rôle de ce gouvernement dans l’histoire italienne.
Il déclara en septembre 2008 : « Questo governo rappresenta la più grande coalizione riformatrice della storia repubblicana » (Ce gouvernement constitue la plus grande coalition réformatrice de l’histoire républicaine).

Alors que le Vatican semble être défavorable à ce projet, les associations LGBT ont gardé l’espoir d’une évolution dans un Etat qui demeure traditionaliste et dont, ni la jurisprudence, ni les menaces de la Cour européenne des droits de l’homme, ne semblaient avoir impressionné. Pourtant, ce mois de mai 2016 marque une date clé pour les droits de la communauté homosexuelle en Italie.

Vito OTTAVIANO

Sources générales :

– http://www.repubblica.it/politica/2016/01/30/news/family_day-132356069/?ref=HREA-1

http://www.leggo.it/NEWS/POLITICA/unioni_civili_gay_cirinn_amp_agrave/notizie/1421622.shtml

http://www.ilfattoquotidiano.it/2014/10/28/nozze-gay-blog-grillo-lancia-consultazione-online-unioni-civili/1175677/

http://www.la-croix.com/Monde/Europe/L-Italie-heure-Pacs-2016-01-28-1200736053

[1] Affaire Oliari et autres c. Italie (requêtes nos 18766/11 et 36030/11)

 

 

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