Employeurs, convoquez avant de licencier !


La convocation du salarié à l’entretien préalable au licenciement est une étape obligatoire qui n’est pas toujours respectée par l’employeur dans le cadre d’une procédure de licenciement. 


Une étape incontournable :

Nous savons que le salarié est, en droit, qualifié de partie faible, et qu’il est protégé par la législation aussi bien interne que communautaire. La législation française fait de la convocation à un entretien préalable au licenciement une étape essentielle de la procédure. En vertu de l’article L1232-2 du Code du Travail, « L’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. » Cette obligation incombe à l’employeur, que le motif soit personnel ou d’ordre économique. Le salarié qui reçoit la notification de son licenciement sans avoir été convoqué à un entretien préalable à celle-ci, subit en effet un préjudice lié à la perte d’une occasion précieuse d’entendre les motifs de son licenciement et de s’expliquer tout en bénéficiant de l’assistance d’un représentant du personnel. Pourtant, le manquement par l’employeur à son obligation ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse. La procédure pourra être poursuivie par l’employeur, et le licenciement pourra être prononcé.

Une sanction pécuniaire en cas de manquement :

Afin de protéger le salarié, la loi a tout de même prévu une sanction, d’ordre pécuniaire. En effet, la méconnaissance de cette obligation constitue une irrégularité de procédure qui se résout en dommages et intérêts. (1). L’article L1235-2 du Code du Travail prévoit, pour toute irrégularité de procédure de licenciement, une indemnité ne pouvant dépasser un mois de salaire. « Si le licenciement d’un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l’employeur d’accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire. ».

 Toutefois, cette indemnité sera différente selon l’ancienneté et l’effectif de l’entreprise.

Ainsi, lorsque le salarié a au moins 2 ans d’ancienneté dans une entreprise de 11 salariés et plus, que le licenciement n’est pas dépourvu de cause réelle et sérieuse mais que la procédure n’a pas été respectée, ce dernier pourra prétendre à une indemnité n’excédant pas un mois de salaire en vertu de l’article L. 122-14-4 du Code du travail. Si en revanche le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, la réintégration du salarié au sein de l’entreprise pourra être proposée par le juge mais refusée par l’une des parties, auquel cas le salarié pourra prétendre à une indemnité d’au moins six mois de salaire. Il est à souligner que cette dernière indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne pourra pas se cumuler avec l’indemnité prévue en cas d’irrégularité de la procédure.

 Par ailleurs, si le salarié a moins de 2 ans d’ancienneté dans une entreprise comptant moins de 11 salariés, que le licenciement n’est pas dépourvu de cause réelle et sérieuse mais que la procédure n’a pas été respectée par l’employeur, cette dernière irrégularité donnera lieu à une indemnité dont le montant est laissé à l’appréciation souveraine des juges en vertu de l’article L. 122-14-5 du Code du travail. L’indemnité sera calculée en fonction du préjudice subi, la limite d’un mois de salaire n’étant pas applicable. Si en revanche, outre l’irrégularité de la procédure, le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse, le salarié pourra prétendre à l’indemnisation de son préjudice dont l’étendue est souverainement appréciée par les juges. Même si l’indemnisation forfaitaire de 6 mois prévue pour les salariés de plus de 2 ans dans une entreprise de plus de 11 salariés n’est pas applicable, rien n’interdira au juge d’estimer le préjudice du salarié à 6 mois de salaire. Petit détail non dénué de sens: Dans le cas d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un salarié ayant moins de deux ans d’ancienneté dans une entreprise de moins de 11 salariés, les deux indemnités pour licenciement irrégulier et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse se cumulent.

Soraya BENKIRANE

Master 1 Droit Privé – Spécialité Droit notarial

Université Paris X Nanterre  

(1) Arrêt de la Cour de cassation, Chambre sociale, rendu le 11/09/2012, cassation (11-20371)

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