La fonction publique représentant environ 20 % de l’emploi en France, elle constitue une part importante de l’électorat pour les futurs candidats à la présidentielle. À l’aube des élections, le sort des agents publics occupe, dès lors, une place clé.
Si aucun candidat n’a pour l’heure annoncé la suppression du statut général de la fonction publique, l’avenir des fonctionnaires apparaît par certains aspects en péril face à l’objectif de réduction des dépenses publiques.
I- Quelles sont les propositions des candidats ?
Fillon et E. Macron proposent, afin de diminuer la dette publique, de procéder à la suppression de postes de fonctionnaires étalée sur cinq ans : 500 000 pour le premier contre 120 000 pour le second. Si la baisse de la masse salariale dans les collectivités territoriales est un objectif commun, plusieurs autres pistes sont avancées telles que le passage de 35h à 39h pour F. Fillon, avec compensation financière seulement partielle, ou encore la multiplication de l’embauche d’agents contractuels pour E. Macron, afin de réduire la pression sur les retraites.
A contrario, d’autres candidats entendent augmenter le nombre d’agents publics pour pallier certaines carences et réorienter les politiques publiques. B. Hamon souhaite recruter 40 000 enseignants pour lutter contre les inégalités scolaires, alors que J-L. Mélenchon et M. Le Pen proposent de renforcer les effectifs de la fonction publique hospitalière en vue de lutter contre les déserts médicaux.
II- Les problèmes juridiques sous-jacents à la suppression de postes
À l’appui de la décentralisation, l’article 72 de la Constitution consacre le principe de libre administration des collectivités territoriales. Ce principe leur accorde une autonomie de recrutement et de gestion de leur personnel[1]. Il est donc juridiquement impossible pour l’État de supprimer directement des postes d’agents publics. Pour contourner cet obstacle, sans révision constitutionnelle, l’une des pistes est de diminuer la dotation globale de fonctionnement (DGF), principale dotation versée par l’État aux collectivités territoriales. L’objectif est de forcer indirectement ces dernières à faire des économies par la diminution de leurs effectifs. L’État pourrait également décider de moduler la part variable de la DGF en fonction des efforts consentis sur la masse salariale.
Néanmoins, comment diminuer la DGF sans violer la portée du principe de libre administration, et plus particulièrement l’autonomie financière des collectivités ? Le risque est réel même si le Conseil constitutionnel a considéré le 29 décembre 2016 que la baisse de 2,6 milliards, par rapport à 2016, était conforme à la Constitution[2]. On peut dès lors s’interroger sur la substance du principe d’autonomie financière, puisque le Conseil constitutionnel n’a, à ce jour, jamais censuré la baisse cumulée de la DGF par le législateur.
Plusieurs alternatives pourraient pourtant être trouvées pour faire des économies sans diminuer les dotations, comme la suppression des départements, voire à terme des communes. Une chose est sûre, la réduction de postes dans la fonction publique ne sera pas une mince affaire. Le problème ne sera pas uniquement local, compte tenu des nouveaux défis auxquels devront faire face les fonctions publiques d’État et hospitalière tels que l’état d’urgence et le renforcement nécessaire de la défense, ou encore le vieillissement de la population.
Eva-Mattéa BEZY
A retrouver dans le numéro du Petit Juriste : Le Petit Juriste, n°39, Avril 2017 (à télécharger)
[1]CC, n° 83-168 DC, 20 janvier 1984.
[2] CC, n°2016-744 DC, 29 décembre 2016, Loi de finances pour 2017.