Fonder son cabinet à 29 ans : retour sur une Success Story

Il y a quatorze ans, Franck Sekri, Jean-Marie-Valentin et Yamina Zerrouk s’associaient. 2018 marque un tournant dans leur histoire avec le départ de Jean-Marie Valentin. Ensembles, les associés fondateurs reviennent sur ces étapes qui ont marqué la vie du cabinet.

Le Petit Juriste. Vous avez fondé Sekri Valentin Zerrouk (SVZ) en 2004. Revenons quatorze ans en arrière. Comment, alors que vous étiez de jeunes avocats, avez-vous fait le pari d’une aventure entrepreneuriale ?

Franck Sekri. Avec le recul, cela paraît en effet un peu fou. Avec Jean-Marie, nous n’avions que 29 ans. Cela semble impensable aujourd’hui. Ça l’était encore davantage au milieu des années 2000, bien avant la vague de création de boutiques que nous observons depuis plusieurs années. Pourtant, si tout cela prenait alors l’allure d’un pari insensé, nous n’avons jamais ressenti de difficulté particulière liée à notre âge.

Yamina Zerrouk. Quelle époque ! J’ai rencontré Franck chez Brandford Griffith, où nous étions voisins de bureau. Régulièrement, nous plaisantions sur l’idée de fonder notre propre cabinet. Un rêve que nous nous autorisions sans trop y croire. Jusqu’au jour où Franck m’invita au restaurant  – un McDonald’s pour l’anecdote – pour me proposer de créer un cabinet avec l’un de ses amis. Quelques jours plus tard, je rencontrais Jean-Marie.

Jean-Marie Valentin. C’est chez Tante Louise, dans le 8è arrondissement, que j’ai fait la connaissance de Yamina. Avec Franck, nous avons débuté ensemble chez Willkie Farr. Quoique très différents, nous nous sommes tout de suite entendus. Fonder un cabinet avec lui, j’y pensais. Mais après avoir rencontré Yamina, il paraissait évident que c’est à trois que nous devions poser notre plaque.

F. Sekri : « Si jeunes et déjà installés, nous étions les rois du monde »

Tout de même, vous n’avez pas douté de votre décision ? Après tout, vous étiez tous les trois promis à un bel avenir dans certains des plus beaux cabinets de l’époque (Gide et Brandford Griffith, ndlr).

F. S. Depuis le premier jour, cela a toujours été simple. Avant tout, il faut préciser que ce sont nos clients qui nous ont poussés à nous installer. Je n’ai jamais eu le sentiment de sauter dans le vide. Bien au contraire : si le succès n’est jamais garanti, nous étions convaincus que SVZ fonctionnerait. Nous ne prenions pas un risque, nous tentions notre chance !

J-M. V. Mettez-vous à notre place : si jeunes et déjà installés dans nos bureaux de la rue de Caumartin. Nous étions les rois du monde ! Autour de nous, des confrères de la même génération nous observaient médusés, nous qui étions déjà nos propres patrons. Nous partagions par ailleurs une vision et des valeurs, ce qui n’est pas anodin. Pas de nom fantaisiste pour notre cabinet alors qu’à l’époque c’était la mode chez les entrepreneurs du droit. Et surtout, nous avons tout de suite pris la forme d’une société commerciale. Nous voulions créer une entreprise. Et je crois que nous avons réussi.

Vous étiez trois jeunes associés en 2004. Le cabinet mobilise aujourd’hui une cinquantaine de professionnels, dont près de quarante avocats. Comment cette croissance s’est-elle organisée ?

Y. Z. C’est en juin 2004, quelques mois après la création de la structure, que nous avons recruté une assistante et notre premier stagiaire en fusions et acquisitions. Un mois plus tard, nous en accueillions un deuxième en droit public. Pour le premier anniversaire du cabinet, nous avions tous les trois un collaborateur dédié. La machine était lancée. Notre développement a suivi un rythme raisonné. Si nous l’avions souhaité, nous serions une centaine d’avocats aujourd’hui. Mais nous nous serions construits au détriment de notre homogénéité et sur la base d’un turnover plus important. Nous ne sommes certes pas des enfants de chœur déconnectés des réalités financières, pour autant, nous ne nous associons pas avec des égos et encore moins avec des chiffres d’affaires. Notre politique de recrutement a toujours été centrée sur les personnes et l’affectio societatis au sein du cabinet.

Y. Zerrouk : »Jérôme Assouline a rejoint le comité de gérance »

Quelles difficultés avez-vous surmontées au cours des quatorze dernières années ?

F. S. En premier lieu, personne n’avait anticipé la crise économique, intervenue moins de trois ans après notre installation. Mais paradoxalement, cela s’est transformé en opportunité pour le cabinet qui a su démontrer sa capacité à accompagner une clientèle de grands comptes à la recherche de prestations haut de gamme proposées à un tarif inférieur aux standards des cabinets internationaux. Pour revenir à la question des difficultés, le principal enjeu pour un cabinet comme le nôtre réside dans le maintien de l’équilibre entre les associés.

J-M. V. Avec Yamina et Franck, nous avons eu des désaccords. Le contraire serait d’ailleurs improbable. Cela étant, nous avons toujours mis un point d’honneur à gérer les conflits – deux en quatorze ans – sans jamais perdre de vue l’essentiel : nous avons créé et développé un cabinet qui nous dépasse désormais. Il n’a jamais été question que SVZ devienne l’otage de nos désaccords.

J-M Valentin : « j’ai pleuré pour la première fois depuis vingt ans »

2018 marque un tournant dans votre vie comme dans l’histoire de SVZ, avec le départ de Jean-Marie, qui a choisi de quitter la profession à la faveur d’un projet entrepreneurial. Comment gérez-vous cette situation ?

Y. Z. De façon simple et transparente. Tout d’abord, nous avons organisé l’accompagnement des clients de Jean-Marie vers d’autres associés. En interne, la gouvernance se met à jour avec la montée en puissance de Jérôme Assouline (associé responsable de la ligne fiscale, ndlr) qui a rejoint le comité de gérance. Pas question non plus de revenir sur la marque que nous avons développée : Valentin aura toujours sa place entre Sekri et Zerrouk !

F. S. Pour moi, le départ de Jean-Marie constitue un changement d’équilibre. Nous avons débuté ensemble. Aujourd’hui, il fonde Seville More Helory, une entreprise technologique qu’il a imaginée et dont il a tracé les contours au sein du cabinet. Pour Jean-Marie, c’est un continuum entrepreneurial. Evidemment, je suis très heureux pour lui. Mais ce serait mentir que de nier l’impact de son départ au plan humain : il me manque déjà !

J-M. V. Yamina et Franck, sont mes frères d’armes. Nous avons tant vécu ensemble ! Je suis fier de notre parcours et de nos réalisations communes. Notre cabinet est devenu une véritable entreprise de services juridiques. Et si je suis incroyablement motivé par mon nouveau projet, j’ai pleuré pour la première fois depuis vingt ans. Pour moi, une page se tourne, mais Franck et Yamina le savent : j’aurai toujours pour Sekri Valentin Zerrouk un attachement indéfectible.

 

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