La liberté statutaire dans les SAS


« Un îlot de liberté dans un océan de réglementation »[1]: cette formule illustre la liberté offerte par la SAS, forme juridique de société française créée par la loi n°94-1 du 3 janvier 1994 pour pallier la rigidité de la SA, dont la plupart des modalités sont fixées de façon stricte par le Code de commerce.

Faute de pouvoir modeler à leur guise les statuts de la société en raison de verrous institués par le législateur, notamment en matière de majorités, les parties étaient condamnées à déroger aux statuts qu’elles avaient elles-mêmes rédigés par des protocoles ou pactes dont la solidité juridique était parfois incertaine.

Pour remédier à ces inconvénients, le législateur a institué en 1994 une nouvelle forme sociale : la société par actions ou SAS. L’idée maitresse est d’offrir aux utilisateurs une forme d’organisation de l’entreprise, dont l’essentiel des règles de fonctionnement résulterait de la volonté des parties, la réglementation de la SA s’appliquant pour le surplus.  


I. Caractéristiques principales de la liberté statutaire

Initialement conçue pour les joint-venture, souvent utilisée dans les groupes de sociétés pour la constitution de filiales détenues à 100% et bien adaptée pour répondre aux attentes d’une holding, s’imposant dans nombre de PME, en particulier à caractère familial, la société par actions simplifiée incarne les liens que les associés choisissent de créer entre eux.

                A.    l’organisation du capital

Cette société est par essence fermée (L.227-2 du Code de commerce), dotée d’un fort intuitu personae et de la possibilité de l’exprimer par des clauses entravant la circulation des titres, en particulier:

  1. Le droit de céder (clauses d’inaliénabilité)

La clause d’inaliénabilité se définit comme « la technique juridique qui, grevant un bien ou un droit, interdit à son propriétaire ou à son titulaire d’en disposer (à titre gratuit ou onéreux), afin d’assurer la protection d’intérêts particuliers ou généraux ». Ces dispositions introduites dans les statuts, viennent heurter le principe d’ordre public de la libre cessibilité des droits sociaux. La société par actions simplifiée est d’ailleurs la seule société dont les statuts peuvent valablement frapper d’inaliénabilité les titres détenus par ses associés pour une durée maximale de dix ans. La limitation dans le temps s’impose précisément. En revanche, l’exigence d’intérêt légitime et sérieux est écartée.

Les associés sont seuls maîtres du contrôle de l’actionnariat de la société (modification des statuts à l’unanimité des associés, expression de leur volonté). Ici la volonté des parties prime sur l’intérêt social : on ne pourrait censurer ou remettre en cause la validité d’une telle clause au regard de l’intérêt social.

Nous tenons à attirer votre attention sur les précautions que les rédacteurs du pacte social doivent prendre dans la rédaction de ces clauses : il convient de préciser le sort de l’inaliénabilité en cas de décès d’un associé ou bien en cas d’inaptitude physique ou juridique. En cas de décès, on peut prévoir que l’inaliénabilité soit maintenue et s’impose aux héritiers, lesquels par ailleurs seront certainement soumis à une clause d’agrément. En cas d’inaptitude ensuite, une dérogation à l’inaliénabilité peut être prévue. Il est également possible, dans cette situation, de s’en remettre au jeu d’une clause d’exclusion (clause que nous étudierons dans un 3e temps).

Rien ne s’oppose à ce que l’inaliénabilité ne frappe que les actions détenues par certains actionnaires seulement

  1. Les clauses d’agrément

L’agrément est une technique juridique qui vise à contrôler l’entrée, au sein de la société, de nouveaux associés, en cours de vie sociale. des clauses d’agrément peuvent etre insérées dans les statuts : elles permettent de se prémunir de toute intrusion externe comme de toute modification de l’équilibre en interne.

Le mécanisme de l’agrément est consacré dans la SAS (société fermée et fort intuitu personae). L’article L.227-14 du Code de commerce dispose en effet que « les statuts peuvent soumettre toute cession d’action à l’agrément préalable de la société ». Ainsi, la liberté offerte aux rédacteurs des statuts de la SAS concerne-t-elle aussi bien le domaine de l’agrément que sa procédure, autorisant une protection efficace de la composition de l’actionnariat.

  •  Domaine de l’agrément : toute cession d’action (notion large)
  • Concernant la procédure d’agrément: en tout état de cause, la doctrine s’accorde à considérer que les statuts peuvent librement s’affranchir des dispositions de l’article L.228-24 du Code de commerce concernant la procédure à mettre en œuvre. toute liberté est de même laissée aux fondateurs du pacte social, les dispositions de l’article L.228-24 du Code de commerce ne s’appliquant qu’à titre supplétif.
  1. L’exclusion des indésirables

Il est également possible, dans cette situation, de s’en remettre au jeu d’une clause d’exclusion.

L’article L.227-16 du Code de commerce dispose que « dans les conditions qu’ils déterminent, les statuts peuvent prévoir qu’un associé puisse être tenu de céder ses titres ».
Sous une appellation édulcorée, ce n’est rien d’autre que la reconnaissance de la validité d’une clause statutaire d’exclusion. L’innovation est de taille, la clause d’exclusion n’ayant jusque-là pas trouvé droit de cité en droit des sociétés. Dans la société par actions simplifiée le législateur offre aux associés le droit de faire primer le respect du pacte social sur d’une part le caractère absolu du droit de propriété de l’article 545 du Code civil et d’autre part sur le droit propre appartenant à tout associé de demeurer dans la société, droit qui est certainement d’ordre public.

  1. Sanction du non-respect des dispositions statutaires

L’article L.227-15 du Code de commerce dispose que « toute cession effectuée en violation des clauses statutaires est nulle ».
Sans faire de distinguo parmi les clauses, La loi sanctionne donc de manière sévère, claire et nette les infractions aux clauses restrictives de la libre cessibilité des titres sociaux. C’est une sanction particulièrement efficace en comparaison de l’inopposabilité

L’avantage essentiel de la SAS est sans conteste la dissociation possible du capital et du pouvoir, qui signifie que les détenteurs du capital ne sont pas forcément ceux qui dirigent la société. Cette dissociation est permise par l’abandon du principe de proportionnalité du droit de vote à la quotité du capital.

               B.     La liberté dans l’organisation du pouvoir

L’article L.227-1 du Code de commerce déclare inapplicables aux SAS les dispositions régissant les assemblées d’actionnaires et la gestion dans la société anonyme.

Ainsi, il accorde aux rédacteurs des statuts de la SAS toute liberté pour déterminer l’essentiel de son organisation. En effet, ils ne sont ni tenus par le principe de hiérarchie des organes sociaux, ni par le formalisme des procédures d’information et de décision.

La liberté dans l’organisation du pouvoir s’exprime aussi bien concernant son attribution (1) que dans son exercice (2).

          i.     La liberté dans l’organisation de l’attribution du pouvoir

  1. La dissociation du capital et du pouvoir

L’article L.227-1 écarte expressément l’article L.225-122 alinéa 1er du Code de commerce qui impose le principe de proportionnalité du droit de vote de chaque actionnaire à la quotité détenue dans le capital social.

Par conséquent, les fondateurs de la SAS peuvent organiser comme bon leur semble l’attribution du pouvoir dans la société, indépendamment de la part détenue par chaque associé dans le capital.

Cette dissociation du capital et du pouvoir implique donc que les détenteurs du capital ne sont pas forcément ceux qui dirigent la société.

  1. L’exercice du droit de vote

L’article L.227-9 du Code de commerce dispose que « les statuts déterminent les décisions qui doivent être prises collectivement par les associés dans les formes et conditions qu’ils prévoient ».

Cet article a donc trois significations : toute liberté est laissée aux statuts tant dans la notion de décision collective que dans la forme et l’organisation au fond de la prise de décision.

  • La notion de décision collective

Selon l’article L.227-9, il n’y a pas de décision collective par nature. Ce sont les statuts qui déterminent la frontière entre les décisions collectives et les autres. Cependant l’alinéa 2 prévoit que les grandes décisions doivent être prises collectivement par les associés.

La liberté dans la définition des décisions collectives est donc affirmée, sous réserve des limitations légales. Deux voies sont alors envisageables pour les rédacteurs des statuts : soit les statuts privent les associés de toutes les décisions autres que celles que la loi leur attribue expressément, pour les confier à toute personne choisie par les statuts, y compris des tiers, soit les statuts prévoient un large renforcement des prérogatives des associés.

  • La forme des décisions collectives

Selon l’article L.227-9 du Code de commerce, ce sont les statuts qui doivent organiser, d’une part, l’information préalable des associés et, d’autre part, les modalités du vote.

Les rédacteurs des statuts pourront donc prévoir une information des associés extrêmement importante ou, au contraire, la réduire au plus strict minimum. Il appartient également aux statuts de prévoir, hors contrainte tenant à la tenue d’assemblées générales, les modalités de la consultation des associés. Ainsi, la consultation peut consister en un vote en assemblée traditionnel, y compris par les moyens modernes de télécommunication tels qu’ils sont envisagés dans les SA, mais aussi en une consultation écrite des associés.

Les statuts sont également compétents pour fixer les règles de quorum et de majorité. De même, ils peuvent déterminer si le vote se fera par tête ou par référence aux titres détenus. Enfin, les conventions de vote sont sans nul doute licites dans les SAS.

          ii.    La liberté dans l’organisation de l’exercice du pouvoir

L’article L.227-5 du Code de commerce dispose que « les statuts fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée ». Il y a là une véritable déréglementation de l’organisation traditionnelle de la direction sociale (structure pyramidale, organes sociaux habilités sont ceux prévus par la loi de 1966).

Cependant, deux obligations s’imposent aux rédacteurs des statuts : celle de désigner un président et celle de statuer sur la direction.

  1. Une obligation légale : la présence d’un président

L’article L.227-6 du Code de commerce énonce que « la société est représenté à l’égard des tiers par un président désigné dans les conditions prévues par les statuts ». La présidence de la SAS ne saurait être collégiale. Le président peut être une personne physique ou morale dont la désignation est librement prévue par les statuts. Quant à la stabilité du président dans ses fonctions, tous les degrés sont possibles, de la révocation ad nutum à l’irrévocabilité. Enfin, les statuts doivent déterminer la durée du mandat, la rémunération ainsi que les obligations du président.

Concernant les attributions du président de la SAS, la loi distingue classiquement l’ordre interne et l’ordre externe. Dans l’ordre interne, les attributions du président sont largement sous l’influence des statuts, la loi précisant que « les dispositions statutaires limitant les pouvoirs du président sont opposables aux tiers ». Dans l’ordre externe, l’article L.227-6 alinéa 4 du Code de commerce attribue au président un pouvoir général de représentation de la société auquel les statuts ne peuvent porter atteinte.

Depuis la loi Sécurité financière du 1er août 2003, le monopole de représentation de la société par le président s’est atténué. En effet, cette réforme a accordé la possibilité de partager le pouvoir de représentation entre le président et une ou plusieurs autres personnes portant le titre de directeur général ou directeur général délégué. Quant à l’encadrement légal des pouvoirs du président, s’agissant des conventions interdites ou réglementées, de sa responsabilité civile ou pénale, il ne se distingue en rien de celui qui est imposé à l’ensemble des dirigeants de la structure.

  1. Une liberté totale : l’existence et les pouvoirs des dirigeants sociaux
  • L’existence des dirigeants sociaux

Sous la réserve de la place obligée faite au président, les statuts peuvent proposer les solutions les plus diverses quant à l’organisation de la direction dans la SAS.

Parmi ces solutions, on peut citer celle du dirigeant unique qui soit le président, celle d’une formule proche de la société à conseil d’administration ou de la société à directoire ou encore celles des instances distinctes ayant un pouvoir de proposition, de décision ou de veto. Par ailleurs, les grandes sociétés connaissent de plus en plus de comités de rémunération, de stratégie, d’audit … Ces comités qui jouent actuellement un rôle à la marge des textes pourraient être juridiquement intégrés dans la direction de la société.

  • Les pouvoirs des dirigeants sociaux

L’essentiel du statut des dirigeants de la SAS relève du domaine contractuel. La loi impose néanmoins quelques limites. Outre les contrôles généraux de l’action des dirigeants comme l’expertise de gestion ou le contrôle des commissaires aux comptes, les dispositions relatives aux conventions passées entre la société et ses dirigeants limitent les pouvoirs des dirigeants. S’agissant des conventions interdites, l’article L.227-12 reprend simplement l’article L.225-43 applicable aux SA et étend son champ d’application au président et aux dirigeants de la SAS.

S’agissant des conventions réglementées, si le champ d’application de la disposition ne varie pas par rapport à celle de la SA, la procédure d’approbation est, elle, assouplie.

En effet, alors que de telles conventions doivent faire l’objet d’une autorisation préalable dans les SA, elles font l’objet d’un contrôle a posteriori dans les SAS. Le commissaire aux comptes présente un rapport sur ces conventions aux associés qui doivent statuer sur ce rapport. En cas de non respect de cette procédure, la convention n’est pas nulle mais les éventuelles conséquences dommageables pour la société seront à la charge du président et des dirigeants.

Enfin, l’article L.227-8 du Code de commerce indique que les règles fixant la responsabilité des membres du conseil d’administration et du directoire des SA sont applicables au président et aux dirigeants de la SAS.

Ce renvoi à une construction connue paraît a priori simple. Cependant, il ne faut pas oublier que la responsabilité des dirigeants de la SAS est étroitement dépendante de l’étendue de leurs pouvoirs. Ainsi, la difficulté essentielle résidera dans l’appréciation de la fonction du dirigeant et donc la part de responsabilité qu’il convient de lui attribuer.

 Liberté statutaire SAS

II.   Limites à la liberté statutaire

  1. Risques envisageables

                         i.        La détermination statutaire des organes de direction

Dans une SAS « les statuts déterminent les conditions dans lesquelles la société est dirigée » en application des dispositions de l’article L.227-5 du Code de commerce.

Ainsi, les associés sont libres de choisir n’importe quel type d’organe de direction; directoire, gérant ou autre. Cet état de fait constitue un des aspects les plus prégnants de la liberté statutaire des SAS mais il est aussi source de risques à plusieurs égards.

Une des difficultés importantes réside, par exemple, dans la définition des pouvoirs et responsabilités au sein de la société, où peuvent être créés des organes non prévus par la loi. Il peut ainsi être tentant de créer un conseil de surveillance et de lui octroyer des pouvoirs de veto sur certaines décisions. Les membres de ce conseil risquent alors d’être considérés comme dirigeants, avec les risques potentiels qui en découlent.  Cette incertitude quant à l’organe véritablement chargé de diriger la société à des conséquences en termes de responsabilités. En effet, en cas de faute de gestion pouvant entraîner la responsabilité du dirigeant le juge recherchera le dirigeant de fait.

                       ii.        Les pouvoirs accordés aux associés

Par ailleurs, la possibilité ouverte aux associés de déterminer quelle majorité permet de prendre les grandes décisions ainsi que la possible absence de quorum peut amener à nier les intérêts des associés minoritaires en les excluant du processus décisionnel. Sur ce point il est important de noter que, dans une SAS, on trouvera  aussi bien des actions sans droit de vote que des actions à droit de vote multiple (ces derniers étant pourtant interdites dans les SA). De tels dispositifs renforcent l’inégalité et donc le risque juridique pour les petits porteurs qui bien souvent n’ont pas voix au chapitre.

De plus, l’absence de quorum et le possible choix de majorité atténuées par rapport à celles employées dans une SA est une source d’insécurité juridiques, ces règles devant permettre une prise de décision réfléchie impliquant tous les associés de la société. A l’inverse, le choix de l’unanimité pour prendre les grandes décisions notamment concernant les titres sociaux peut enfermer l’associé dans la structure sans retour en arrière possible.

Toutefois, il convient de nuancer ces propos car bien que cette liberté paraisse dangereuse et inégalitaire, elle a un véritable intérêt dans la pratique, et notamment dans le cas de la transmission d’une entreprise familiale.

                     iii.       L’information accordée aux associés

En matière d’information des associés devant permettre une prise de décision rationnelle de leur part, la SAS est une fois de plus atypique. En effet, la non application à la SAS des dispositions afférentes à l’information des associés prévues pour les SA a pour corollaire la disparition des sanctions attachées au non-respect de ce droit d’information (art. L.225-119 et L.225-121 du Code de commerce).

Il en résulte qu’à défaut d’insertion dans les statuts d’un tel droit d’information des associés de la SAS, ces derniers ne disposeront d’aucun fondement pour demander en justice la communication d’informations sur la société ou son activité. Les associés pourront obtenir, tout au plus, les informations minimales en vue de leur permettre de prendre une décision suffisamment éclairée.

À défaut d’informations minimales, on peut  néanmoins supposer que la décision serait jugée nulle en raison de l’absence de consentement véritable, faute pour les associés d’avoir été suffisamment éclairés. En dehors du risque que cela représente pour les associés, qui n’ont aucune visibilité sur la société au sein de laquelle ils ont engagé des intérêts financiers, cela constitue un risque pour la société dont les décisions stratégiques sont prises par des personnes ne disposant pas de toutes les informations nécessaires pour faire les meilleurs choix possibles.

                              iv.     La question de l’intuitu personae

Les SAS sont souvent fondées sur un fort intuitu personae. Ainsi un associé peut se voir évincé de la structure si l’on considère qu’il ne possède plus certaines qualités qui avaient amené les autres associés à contracter avec lui au départ. L’associé peut en outre se voir opposer, outre l’inaliénabilité, à tout le moins une négociabilité très limitée de ses titres, le rendant ainsi prisonnier de la structure.

Il arrive que le juge s’immisce dans les règles établies par les associés. Par exemple, dans un arrêt rendu le 5 mai 2009202, la Cour de cassation a autorisé l’exclusion des associés dirigeants d’une SAS par les autres associés, faisant prévaloir le quorum exigé par les statuts des ¾ des actions, indépendamment des droits de vote attachés à ces dernières. Là encore, le manque de précision des statuts tout comme le manque de prévisibilité des solutions judiciaires a été fatal à l’équilibre ou au déséquilibre initialement voulu par les fondateurs de la SAS.

  1. Précautions tout au long de la vie de la SAS

Assimilable à « une formule un » du droit, la SAS ne doit pas être mise entre les mains d’utilisateurs inexpérimentés. Cette idée doctrinale rappelle que de nombreuses précautions doivent être prises en matière de SAS, pour rendre ce type de société efficiente.

                                i.        La naissance de la société : rédaction des statuts

Le premier point sur lequel il convient de s’arrêter est la rédaction des statuts. En effet, la liberté étant totale, une rédaction de statuts cohérents est la première des précautions contre des éventuelles failles juridiques. Il faut notamment faire attention à l’imbrication des différentes clauses entre elles.

Une solution peut être le renvoi aux règles légales posées pour la SA, en précisant sur certains points, la mention « cette disposition ne sera pas applicable à la SAS » ou « la disposition suivante sera remplacée par… ». Un tel procédé est peu audacieux mais évite de créer de grands déséquilibres parfois irrémédiables.

Faire appel à un professionnel du droit tel qu’un avocat ou un notaire paraît également judicieux. Son expertise évitera toute incohérence.

                               ii.       Pactes et accords annexes aux statuts

Tout d’abord, la rédaction d’un préambule aux statuts peut être intéressante. Bien que non engageant juridiquement parlant en lui-même, le préambule permet d’interpréter les dispositions des statuts en posant les buts recherchés par les parties. Il s’agit donc d’une précaution utile, lorsque certaines parties craignent une mauvaise interprétation de certaines dispositions.

Ensuite, les associés peuvent prévoir un pacte, qui permet une certaine confidentialité. De plus, le pacte d’associé peut être modifié sans nécessiter une unanimité. Il peut être préconisé en ce qui concerne des dispositions non valables sur le long terme.

Reste que dans la société par actions simplifiée comme dans les autres structures sociales, les pactes d’actionnaires souffrent toujours du problème de leur sanction, comme de leur inopposabilité aux parties non signataires et donc à la société elle-même.

III. Vers un retour de la liberté contractuelle en droit des sociétés ?

« La liberté statutaire redevient compatible avec la limitation de responsabilité, ce qui est (…) un retour aux origines de la société par actions »[2].

Dans la période récente, la législation sur les sociétés – et tout particulièrement sur les sociétés anonymes – n’a cessé de développer des prescriptions toujours plus détaillées et généralement de caractère impératif. Or, la rupture, à cet égard, est ici complète. Le contrat, dans la loi de 1994, prend à nouveau le pas sur l’institution.

La SAS est la consécration de l’autonomie de la volonté ; En effet, habituellement, la liberté contractuelle, qui est laissée aux associés, a comme contrepartie leur obligation personnelle au passif social. Telle est la situation des sociétés civiles, des sociétés en nom collectif et, s’agissant au moins des associés commandités, des sociétés en commandite simple ou par actions. Au contraire, le choix d’une forme sociale excluant cette responsabilité personnelle des associés entraîne de manière générale l’application d’un régime beaucoup plus contraignant, comme on peut l’observer s’agissant des S.A.R.L. et surtout des sociétés anonymes. Or dans le cas de la SAS, la liberté n’a pas pour corolaire une obligation personnelle des associés au passif social. Le risque reste limité et l’opacité de la personne morale joue. C’est un des éléments fondamentaux la rendant si novatrice.

Néanmoins, en présence d’une telle liberté statutaire, il devient absolument essentiel pour les fondateurs de la société de faire preuve de précision et de prudence dans leur constructionsociétaire. Ils doivent donc concentrer toute leur attention sur la rédaction des statuts sans pour autant négliger l’utilité des pactes annexes.

Marine SAIMAN



[1] GUYON Y., Présentation générale de la société par actions simplifiée, RS 1994, p. 207.

 

[2] GUYON Y., L’élargissement du domaine des sociétés par actions simplifiées (loi du 12 juillet 1999, art. 3), RS 1999, p. 505.

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