Loi Sapin II et lutte anticorruption dans le sport

2017 sera-t-elle l’année du renouveau ?

L’année 2016 aura été particulièrement noire pour le sport : le dopage d’Etat mis en place en Russie, le système de corruption au sein de la gouvernance de la FIFA et de la Fédération Internationale d’Athlétisme et la récente affaire d’évasion fiscale révélée par Football Leaks.

La corruption sportive concerne non seulement les athlètes, qui peuvent tricher, mais aussi les agents publics qui gouvernent les institutions sportives à la dérive. Dans la dynamique actuelle de transparence, l’Etat français souhaite redonner aux citoyens confiance dans les institutions publiques, une volonté qui s’illustre par des mesures concrètes comme la Loi Sapin II. Adoptée le 9 décembre 2016, cette loi comporte un volet anticorruption, dans lequel sont établies plusieurs mesures pour lutter contre la corruption des entreprises et agents publics.

 

La loi Sapin II peut-elle permettre de lutter contre la corruption dans le sport ?

 

Si le texte adopté le 9 décembre 2016 ne vise pas expressément les dérives du milieu sportif, plusieurs mesures peuvent toutefois servir à la lutte anticorruption sportive en France.

 

  • Agence française anticorruption :

L’article 1er de la Loi Sapin II établit une Agence française anticorruption, service national ayant pour mission d’aider les autorités compétentes et les personnes dans la prévention et détection des faits de corruption. La nouvelle institution gouvernementale remplace ainsi l’ancien Service central de prévention de la corruption, dont les fonctions ne permettaient pas l’investigation. L’Agence française anticorruption, dans la limite de sa compétence nationale, pourra mener ses enquêtes. Il reste à préciser l’étendue de ses pouvoirs dans le décret d’application, en cours de rédaction, étant notamment essentiel de pouvoir enquêter sur la fraude dans les paris sportifs en ligne.

 

  • Infraction du trafic d’influence d’agent public étranger :

La loi Sapin II crée l’infraction du trafic d’influence d’agent public étranger, versement d’argent envers un agent public étranger pour qu’il use de son influence pour obtenir une décision. Une commission des sanctions est prévue au sein de l’Agence française anticorruption pour déterminer les sanctions pécuniaires, limitées à 200 000 € pour les personnes physiques et 1 million d’euros pour les personnes morales[1]. Cette création permet de combler une lacune à niveau nationale, cette infraction étant déjà réprimée à l’échelle internationale par la Convention des Nations Unies depuis 2003[2]. Dans le sport, pour un exemple suisse de trafic d’influence d’agent public étranger, le versement sans base légale de 2 millions francs suisses par Sepp Blatter envers son conseiller Michel Platini à la FIFA.

 

  • Protection des lanceurs d’alerte :

Le chapitre II de la loi est consacré à la protection des lanceurs d’alerte. Cette technique traditionnellement utilisée pour dénoncer la corruption dans les entreprises s’applique parfaitement au domaine sportif. C’est d’ailleurs grâce à Andreï Baranov, un entraineur russe, que le système de corruption au sein de la Fédération internationale d’athlétisme fut révélé. Une démarche encouragée par l’Agence mondiale antidopage qui réduit les sanctions en cas d’aide dans l’enquête de corruption, que pourra imiter l’Agence française.

La Loi Sapin II est utile à la lutte anticorruption sportive et « la glorieuse incertitude du sport, la loyauté et l’image des athlètes sont autant de valeurs mobilisatrices et populaires qui risquent d’être ébranlées si aucune mesure sérieuse n’est envisagée pour mettre un terme à la corruption »[3].

 

Pour en savoir plus : 

[1] Loi Sapin II, article 17.

[2] Convention des Nations Unies contre la corruption, article 18.

[3] P. BONIFACE, S. LACARRIERE et P. VERSCHURREN, Paris sportifs et corruption. Comment préserver l’intégrité du sport, Iris, 2012.

 

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