Reconsidérer une incomprise : la compétence personnelle passive


Le contexte international est prompt à la liberté de circulation des individus, mais également à celle des infractions. Bon nombre d’actualités récentes font état d’infractions commises à l’encontre de français. La nationalité de la victime justifie une compétence des tribunaux français ; toutefois, la compétence personnelle passive est source de controverses doctrinales ; critiques qui, aujourd’hui, semblent atténuées.
En Droit français, l’article 113-7 du Code Pénal dispose que « la loi pénale française est applicable à tout crime, ainsi qu’à tout délit puni d’emprisonnement, commis par un Français ou par un étranger hors du territoire de la République lorsque la victime est de nationalité française au moment de l’infraction » ; en outre tous ressortissants français disposent d’une certaine protection de la loi française lorsqu’ils se rendent à l’étranger. Toutefois, cette disposition du Code Pénal a fait l’objet de vives critiques pour ses trop larges modalités d’application et son manque d’approche pragmatique quant à la coopération judiciaire internationale (1) (2). Ces prises de position, majoritairement en faveur d’une limitation de cet article 113-7 du Code Pénal, souffrent d’un oubli qui permet d’asseoir un peu plus cette volonté de réduction de la compétence personnelle passive : la question de l’articulation de cette disposition avec le développement, croissant, de la coopération judiciaire internationale que ce soit dans le cadre institutionnel – avec l’exemple du mandat d’arrêt européen – ou dans un schéma plus restreint, celui de relations bilatérales. En d’autres termes, il faut nécessairement considérer la compétence personnelle passive avec son instrument d’action, sans lequel elle ne serait que lettre morte.
De fait, aujourd’hui, dans ce contexte d’internationalisation des échanges – financiers, de marchandises ou humain – l’on ne peut plus se cantonner à une étude de la seule compétence passive ; l’on ne peut plus se borner à l’étude de procédés de coopération internationale ; il faut nécessairement considérer que l’interrogation générale n’est plus seulement celle de la critique, contestable, de la compétence personnelle passive en Droit pénal français (I) mais celle de son articulation avec les différents biais de la coopération judiciaire internationale pour en développer une nouvelle efficacité (II), sans oublier l’impact de ces procédés internationaux sur le Droit commun de l’extradition (III).

I) Une nécessaire réécriture de l’article 113-7 ?

La reconsidération de l’article 113-7 du Code Pénal était une demande largement formulée avant les années 2010 ; mais depuis il semblerait que la compétence personnelle passive dispose d’un certain répit. Il faut préciser que ces critiques à l’égard de la compétence personnelle passive ont été formulées, pour les plus connues, par des praticiens qui, à titre principal, mettaient en avant des conditions d’application trop large laissant supposer une trop facile utilisation de la disposition, et donc d’une trop importante immixtion de la Justice française sur le territoire étranger
Il est nécessaire aujourd’hui de mener une nouvelle étude de la disposition et ainsi balancer les observations passées avec une observation plus actuelle, marquée de l’évolution de la considération de la compétence personnelle passive.
Il a été soutenu que l’application de l’article 113-7 est (trop) laxiste, compte tenu de sa disposition jumelle, la compétence personnelle active qui connait des conditions plus strictes. Quelles sont les différences entre ces deux dispositions, relevant finalement d’un même ensemble juridique : l’application de la loi pénale française à l’étranger ?
La compétence personnelle active (article 113-6) prévoit que la pénale française est applicable à tout Français qui commettrait un crime ou un délit à l’étranger, à condition que ce pays « hôte » en prévoit également l’incrimination délictuelle ; la seule exception étant portée à cette disposition est celle apportée par la loi du 17 juin 1998 (loi n°98-468) prévoyant que les infractions sexuelles commises sur des mineurs de quinze ans permettent, et on le comprend aisément, une dispense de la double incrimination.
A l’inverse, la compétence personnelle passive ne retient pas la règle de la double incrimination, et limite la matière délictuelle aux délits punis d’emprisonnement.
En conséquence, nous observons deux différences notables et non des moindres :
La compétence personnelle passive, en ne reprenant pas la règle de la double incrimination, va à l’encontre du système de régulation dans les rapports juridiques internationaux, et apparait comme plus facilement applicable que sa disposition jumelle. En effet, comme le rappelait Renée Koering-Joulin, c’est la double incrimination qui vient réguler ce jeu de l’application de lois à l’étranger du fait que dès lors que le pays « hôte » est venu incriminer lui-même un comportement délictuel ou criminel, il conserve sa souveraineté en consentant à ce que la loi étrangère, qui prévoit cette double incrimination, s’applique sur son territoire. En conséquence, dans le cas de la compétence personnelle passive, l’Etat où l’infraction s’est produite voit sa souveraineté limitée par une disposition française qui va avoir l’ambition de s’appliquer (l’ambition seulement, à ce stade, du fait que l’article 113-7 n’est qu’une disposition vide sans l’extradition).

Cependant, il faut mettre de côté (pour le moment) l’argument de la souveraineté et s’attacher au fait qu’il est plus facile d’appliquer la loi française à une victime française qu’à un délinquant français ; en conséquence l’on observe une autre différence entre les articles 113-6 et 113-7 : la nationalité de la victime. Et c’est ici que se trouve toute la clef pour comprendre le rapport qu’entretiennent les dispositions sur l’application de la loi à l’étranger : la considération de la victime, du moins de sa nationalité, ce qui permettra de considérer la plus ou moins grande facilité d’application de la disposition. Ainsi, quand la victime est française (compétence personnelle passive), la loi française voit des conditions d’application plus souples afin de protéger un ressortissant. Dans le cas inverse, celui d’une victime étrangère (qui plus est sur son territoire ; compétence personnelle active), la disposition française va se doter de conditions plus strictes pour, finalement, encourager une compétence judiciaire du pays de la victime et, nous pouvons l’affirmer de ce constat, ainsi de sanctionner le délinquant français ; aussi, de ce point de vue, l’on peut dire que finalement, même si la loi française ne trouvera pas application (le cas échéant) pour le cas d’un délinquant français, elle le sanctionnera puisque ce sera une loi « inconnue » qui lui sera appliquée.
Cette considération de la victime se trouve également affirmée dans la jurisprudence de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation (3), rappelant que la seule nationalité de la victime doit être prise en compte, et non celle, le cas échéant, de ses ayants-droit ; ce qui tend à asseoir cette argument de la considération de la nationalité de la victime en lieu et place d’un raisonnement axé uniquement sur une facilité, ou non, d’application de l’article 113-7.

La compétence personnelle passive s’applique dès lors qu’un crime ou un délit puni d’emprisonnement a été commis sur un ressortissant de l’Hexagone et surgit ici une nouvelle critique plusieurs fois formulée : prendre tous les délits punis d’emprisonnement c’est prendre la quasi-totalité des délits présents intra et extra Code Pénal, et donc avoir (encore) une trop grande facilité d’application.

Il faut noter ici que cette considération des délits punis d’emprisonnement est dans le sens d’une limitation de la compétence personnelle passive compte tenu des conditions de l’article 113-6 ; en effet, cet article de la compétence personnelle active mentionne également les crimes mais aussi les délits (à condition, dans ce cas, de la double incrimination) sans exceptions. Aussi, nous voyons aisément que la compétence personnelle passive est limitée, par rapport à sa fausse jumelle ; pour ce qui est du nombre (trop) important de délits concernés par l’article 113-7, la remarque ne doit pas fournir une critique de la compétence personnelle passive mais plutôt celle de l’échelle des peines et des incriminations.
Cependant, là où il faut rejoindre ces auteurs de cette critique des délits concernés, c’est quant à l’opportunité. Est-il bien opportun, comme le soulignait Renée Koering-Joulin ainsi que Éric Cafritz et Omer Tene, de confier au juge français tous ces délits ? La réponse est évidemment non, que ce serait plus l’étouffer que de le laisser travailler comme il le devrait. Mais, cependant, il faut rester pragmatique et rappeler que tous les délits mentionnés par l’article 113-7 du Code Pénal ne sont pas dans les faits concernés.
Ainsi, eu égard aux observations produites concernant les critiques faites au sujet de la compétence personnelle passive en Droit pénal français, il faut affirmer que la réécriture de l’article 113-7 ne parait pas, finalement, nécessaire, du moins au stade premier de la considération de la disposition pour elle-même car, nous l’avons vu, l’article 113-7 convient d’une protection de la victime française et que même si son champ d’application au regard des comportements délictueux apparait comme trop vague et manquant d’opportunité, il faut rappeler ici que ce manque d’opportunité n’apparait être que théorique et que, pragmatiquement, il apparait peu probable que le juge français connaissent de tous les types de délits commis à l’étranger, par un étranger et dont la victime est française ; enfin il faut, sur la considération de l’aspect pragmatique, évoquer qu’aujourd’hui la compétence personnelle passive apparait nettement plus efficace.

II) Les nouveaux procédés de coopération internationale : nouvelle efficacité de la compétence personnelle passive ?

Comme il l’a été suggéré aux prémices de l’étude, la compétence personnelle passive ne saurait induire la seule critique de sa disposition sans, disons-le, une considération de son instrument d’action : la procédure d’extradition, du moins toutes mesures de coopération juridique et judiciaire transnationale. En effet, si l’on ne se rapporte qu’aux critiques déjà évoquées, l’on retrouve celle de l’efficacité mais qui n’a été traitée qu’à la lisière de la question.
Aujourd’hui, avec le recul nécessaire quant aux différents outils de coopération juridique et judiciaire international, il est possible d’apporter une observation quant à l’efficacité de la mise en place de l’article 113-7 du Code pénal ; toutefois, l’étude ne comportera pas de référence au Droit commun de l’extradition (articles 696 et suivants du Code de Procédure Pénale) en raison d’une trop grande variable quant à l’efficacité de cette procédure, cette variable venant, principalement, du fait de la participation d’un nombre trop important d’Etat entrainant, ipso facto, de trop grandes divergences de réponse à cette demande de remise d’un citoyen à l’Etat requérant, du fait de l’absence d’une base juridique permettant d’uniformiser cette question entre une entité importante d’Etat, tous potentiellement Etat requérant.
C’est pourquoi la question de l’efficacité de la mise en place de la compétence personnelle passive sera étudiée avec un dispositif de remise (4) mais disposant d’un périmètre étatique et d’une base dispositionnelle déterminée afin d’obtenir une réelle réponse à la question : le mandat d’arrêt européen.
Issu de la décision-cadre du Conseil de l’Union Européenne du 13 juin 2002, le mandat d’arrêt européen est défini à l’article 695-11 du CPP ; sans reprendre la définition complète de l’article, il faut noter que le mandat d’arrêt européen est une décision venant d’un pays membre de l’Union Européenne (pays d’émission) aux fins d’arrestation et de remise d’un individu par un autre Etat de l’Union Européenne (Etat d’exécution). Toutefois, le mandat d’arrêt européen n’est pas émis pour tous les types de comportement criminels (ou délictuels), il faut à ce sujet se référer à l’article 695-12 du CPP : les faits concernés sont ceux punis d’une peine privative de liberté d’une durée d’au moins un an (l’on peut observer ici que sont concernés ici les crimes et les délits punis d’emprisonnement, à l’instar de la compétence personnelle passive). Il faut enfin évoquer le fait qu’un mandat d’arrêt européen n’est pas exécuté automatiquement, des hypothèses prévoient en effet que cette décision ne s’exécute pas en cas : d’amnistie, d’une décision judiciaire définitive qui a été rendue pour les mêmes faits, minorité pénale, acquisition de la prescription de la peine ou de l’action publique et en cas de mandat délivré pour raison fondée sur une discrimination raciale, sexuelle, politique, … (5) .
Alors que nous avons posé les bases de ce qu’est le mandat d’arrêt européen, il importe à présent d’étudier l’articulation de ce dispositif avec l’article 113-7 du Code Pénal. Il apparait nettement, eu égard aux éléments développés ci-dessus, que ce dispositif de coopération européen constitue le moyen d’action de la compétence personnelle passive au sein de l’Union Européenne (6) ; permettant ainsi l’efficacité, si longtemps recherchée, de l’application de la compétence personnelle passive ; du fait que sans un tel outil, il serait vain de tenter d’appliquer à un étranger la loi pénale d’un pays ressortissant de l’Union Européenne.
Toutefois, la question de l’efficacité qui ne cesse d’être évoqué au cours de cette étude ne peut se résoudre par l’addition théorique du mandat d’arrêt européen avec l’article 113-7 du Code Pénal ; il est nécessaire de mener l’étude au travers de chiffres permettant le véritable reflet d’une efficacité de l’application de la compétence personnelle passive (7).
Sur l’année 2013 (8), 8513 mandats d’arrêts européens ont été émis par 10 pays membres de l’Union Européenne et sur ces mandats émis, 2369 ont conduit à la remise effective de la personne recherchée, soit 27,83% des mandats émis ; ainsi, un peu plus du quart des mandats émis débouchent sur une arrestation et la remise de l’individu au pays d’émission. Peut-on à ce stade parler d’une efficacité du mandat et, par extension, une efficacité de l’application de la compétence personnelle passive ?
Il faut affirmer que ce chiffre de 27,83% de « succès » du mandat d’arrêt européen n’est pas négligeable même s’il apparait faible compte tenu du nombre de mandat qui reste infructueux ; mais cela permet de noter une certaine efficacité même si elle reste modérée. A présent, est-ce qu’il nous est possible de dire que cela démontre l’efficacité de l’application de la compétence personnelle passive ? Il faut ici être plus modéré. En effet, rappelons que la France n’a pas participé au questionnaire d’où sont tirés les chiffres, ce qui impose une grande prudence du fait que l’étude porte sur une disposition française et ainsi conclure que ce chiffre représente l’efficacité de l’article 113-7 serait faux. De plus, les chiffres ne permettent pas de savoir si les personnes remises aux Etats d’émission sont des nationaux ou alors des personnes étrangères ayant commis un crime ou délit sur un ressortissant de ces pays d’émission. Alors, quid de la question de l’efficacité ? Peut-on la trancher finalement ? Au vue des statistiques produites, il est impossible de répondre à cette question, l’on a les prémisses de la réponse avec l’efficacité globale du dispositif de mandat d’arrêt européen mais une efficacité qui ne restera utile que pour l’étude du mandat d’arrêt européen même si elle renseigne sur la compétence personnelle passive puisqu’il est indéniable que le mandat d’arrêt européen soit la clef, au sein de l’Union Européenne, de la réussite de la mise en application de la compétence personnelle passive car sans mandat d’arrêt européen, l’on ne pourrait effectivement appliquer la loi pénale française car la personne recherchée ne purgerait pas dans les faits la peine prononcée par les juridictions répressives françaises.
La question de l’efficacité de la compétence personnelle passive, s’avérant donc matériellement compliquée dans la réponse à apporter, nous permet néanmoins d’aborder, bien entendu de manière plus théorique, les conséquences d’une telle efficacité. Il faut voir ici le fait que même s’il n’est pas réellement possible de quantifier l’efficacité de la compétence personnelle passive, il est possible d’évoquer des implications de celle-ci ; notamment sur le pays où le crime ou le délit a été commis, mais également, et surtout, sur le délinquant lui-même ; conséquences qui ont déjà été formulées2 3.
Evoquons tout d’abord la position de la compétence personnelle passive quant au pays qui a « accueilli » l’infraction commise sur un ressortissant français : l’on ne pourra nier que cet Etat va perdre ici de son autorité du fait que ce ne seront pas ses juridictions répressives qui pourront connaitre de l’inculpation (éventuelle) de la personne accusée ; c’est ici qu’apparait la première conséquence [et critique] de l’application effective de la compétence personnelle passive : la souveraineté. En effet, comme le rappelait Renée Koering-Joulin, la compétence personnelle passive ne connait pas la double incrimination dans ses conditions d’application, et donc méprend le pouvoir régalien de l’Etat où l’infraction a été commise. Cette affirmation est tout à fait vraie, toutefois lorsqu’on n’envisage la compétence personnelle passive sans méthode d’application ; rappelons alors que pour prospérer l’extradition est nécessaire et c’est ici que l’Etat « hôte » de l’infraction va retrouver son pouvoir souverain. En effet, c’est bel et bien cet Etat souverain qui a accepté d’entrer dans l’Union Européenne et ensuite d’en appliquer le mandat d’arrêt européen (9) (ou dans un cas plus général, c’est cet Etat accueillant l’infraction qui a signé des conventions d’extradition) ; ainsi, l’argument de la souveraineté contre la compétence personnelle passive ne peut véritablement prospérer puisque l’article 113-7 n’est qu’article vide en lui-même ; ce qui nous montre encore une fois que la considération de l’article 113-7 du Code Pénal s’avère incomplète du fait que lui est associé de manière inévitable tous procédés relatifs à l’extradition.
A présent, quel pourrait-être l’impact de l’application de la compétence personnelle passive sur le délinquant lui-même, s’il y a réellement une implication ? Cette conséquence est quasiment unique, si l’on met de côté toutes implications sur le fait que le délinquant ne connait pas le système répressif qui le jugera, posant problème pour les droits de la défense (quoique, sur ce point, la critique ne soit pas fondée du fait que la compétence personnelle passive ne prive en aucun cas le délinquant des droits de la défense et, a fortiori, d’être représenté par un avocat). Cette implication donc, rappelée par messieurs Cafritz et Tene3, concerne la possibilité pour le délinquant d’être poursuivi pour des faits qui n’en n’entrainerait pas sous le joug de la législation pénale de son Etat ; en d’autres termes, le délinquant serait la victime d’une disposition qui irait à l’encontre d’un principe fondamental du Droit pénal. Sur un plan tout à fait théorique, l’on peut dire qu’effectivement la compétence personnelle passive va à l’encontre de ce principe et que donc le délinquant devient, paradoxalement, victime du système car étant accusé pour un fait qui, dans l’état du Droit répressif de son pays, et qu’il n’est pas censé ignoré, l’incrimination n’existe pas.
Toutefois, il ne faut pas se laisser attirer par des appréciations théoriques et justement, ce qui était reproché à l’article 113-7 du Code Pénal, raisonner pragmatiquement ; ainsi l’on pourra dire que finalement le délinquant ne saurait en aucun cas être surpris par une incrimination inconnue par le système juridique dont il dépend. En effet, sans faire de spéculation, l’on peut dire que les infractions commises sur des ressortissants français sont assez limitées du fait que ces ressortissants français, potentielles victimes, sont dans le cas le plus général des personnes en vacances, donc des touristes (il faut ici ne pas comprendre que d’autres cas sont écartés mais qui ne seront pas évoqués du fait d’une appartenance à d’autres disciplines juridiques, le Droit commercial entre autres) ; et donc, le tourisme n’attire que certains types d’infractions : les atteintes aux personnes (violences, …) et aux biens (vol, …) ; en somme des infractions qui sont réprimées par dans la majorité, si ce n’est dans tous, des systèmes répressifs aujourd’hui.
Aussi, nous pouvons dire que même s’il n’est pas prouvé que la compétence personnelle passive s’est dotée avec le temps d’une efficacité, il est indéniable d’affirmer que les conséquences qu’elle emporte sont loin de porter atteinte aux intérêts de l’Etat qui a accueilli l’infraction ; et encore moins les intérêts du délinquant du fait que les systèmes juridiques tendent à s’uniformiser sur des incriminations essentielles au maintien de la stabilité sociétale.

III) Le Droit commun de l’extradition aujourd’hui : dépassé par le contexte international ?

Annoncées par l’article 696 du Code de Procédure Pénale, les dispositions relatives à la procédure d’extradition telle que disposée en France sont menacées ; et cette menace vient d’une disposition elle-même, le premier article de ce Droit commun de l’extradition : l’article 696.
En effet, disposant que « En l’absence de Convention internationale en stipulant autrement […] », l’article 696 ne fait que faire application de l’article 55 de la constitution et respecter la hiérarchie des normes. Toutefois, ce respect de la théorie générale du Droit ouvre une problématique certaine : la quasi disparition de l’application de dispositions de Droit interne au profit de la coopération internationale ; du fait qu’aujourd’hui, en matière d’extradition, la France a conclu bon nombres de Conventions notamment en Europe que ce soit par le biais de l’Union Européenne (avec le mandat d’arrêt européen qui va développer une procédure qui lui est propre) mais aussi par l’intermédiaire du Conseil de l’Europe et de la Convention européenne d’extradition (signée le 13 décembre 1957).
Alors, affirmer que ces dispositions soient menacées est certainement une exagération du fait que l’article 696 permet une certaine subsistance de l’application des articles 696 et suivants du CPP par la prescription suivante : « Ces dispositions s’appliquent également aux points qui n’auraient pas été réglementés par les conventions internationales ». Aussi, il apparait évident qu’il y a eu un changement de place de ce Droit commun de l’extradition : passant d’un Droit recevant une compétence de principe (à l’époque d’une absence de relations internationales concrètes) à une compétence d’attribution, à savoir une application de ces dispositions lorsqu’une Convention n’existe pas ou alors lorsque celle-ci s’avère être muette sur certains points ; le Droit commun étant alors le filet de sécurité de la procédure, pour permettre à ce que la répression soit effective pour permettre la protection de la victime, qui finalement s’avère être l’un des points essentiels du Droit Pénal et de ses pendants : la répression c’est certes permettre de retrouver la stabilité de la Société ; mais c’est avant tout la reconnaissance, la protection de la victime qui n’a pas pu en profiter a priori.

Benjamin TROUILLE
Etudiant en Master1 « carrières judiciaires et sciences criminelles » ; Université Paris II, Panthéon-Assas.

1. KOERING-JOULIN Renée, « Appréciation critique du droit français de la compétence personnelle passive », in Mélanges dédiés à Bernard Bouloc, Paris : Dalloz, 2007, p. 529-537.

2. CAFRITZ et TENE, « Plaidoyer en faveur d’une restriction de la compétence personnelle passive en Droit français », RSC, 2003, n°4, p. 733-743.

3. Crim., 31 janv.2001

4. Article 695-22 CPP

5. Il faut ici employer le vocable de « remise » et non « extradition » car le mandat d’arrêt européen n’est pas à proprement parler une extradition.

6. Il faudrait ajouter à ce stade que l’UE ne retient pas toutes les possibilités de coopération internationale ; le Conseil de l’Europe disposant de la convention européenne d’extradition (du 13 décembre 1957) dont les signataires sont les pays membres de l’organisation.

7. Il faut noter que l’objet de l’étude n’est pas le mandat d’arrêt européen en lui-même, aussi les statistiques utilisées seront globales et ne serviront qu’une conclusion générale sur l’articulation du mandat et de la compétence personnelle passive.

8. Statistiques basées sur les réponses fournies par les Etats membres de l’UE au questionnaire 8111/05 COPEN 75 EJN 23 EUROJUST 24. Il est à noter que tous les Etats n’ont pas répondu aux questions et donc les chiffres ne représenteront qu’un aperçu.

9. Comme l’affirmait l’article de KROLIKOWSKI et ZNOJEK, « L’argument de la souveraineté en contestation du mandat d’arrêt européen », RSC, 2006, n°3, p. 551-567.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.