Retour d’expérience sur la 4e édition du Concours Vedel

Avec pas moins de 17 universités en compétition ainsi que 78 étudiants issus de 21 masters 2 différents, le concours Vedel est en passe de devenir un évènement incontournable de la scène juridique.

Cette année, la finale du Concours Georges Vedel de la meilleure plaidoirie QPC a eu lieu le 14 mai dans l’enceinte même du Conseil constitutionnel. Le jury fut présidé par le Professeur Jean Gicquel et composé de :

  • Claire Bazy Malaurie, membre du Conseil constitutionnel,
  • Isabelle De Silva, conseiller d’Etat,
  • Yves Charpenel, premier avocat général à la Cour de cassation,
  • Louis Boré, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation,
  • Pascale Modelski, bâtonnier du barreau des avocats de Grenoble

Ces derniers ont alors  attribué  le prix de la meilleure plaidoirie QPC à l’équipe de l’Université Saint-Etienne Jean-Monnet en leur qualité de demandeur et à l’équipe Paris I Panthéon-Sorbonne pour la meilleure défense.

L'équipe de l'université Saint-Étienne Jean Monnet , lauréate du Prix Georges Vedel 2014 pour les "demandeurs"
L’équipe de l’université Saint-Étienne Jean Monnet , lauréate du Prix Georges Vedel 2014 pour les « demandeurs »

 

Présentation et déroulement du concours :

Créé en 2011 à l’initiative du Professeur Dominique Rousseau (Paris I – Panthéon-Sorbonne), le concours Georges Vedel a pour objet de faire connaître auprès des jeunes juristes la question prioritaire de constitutionnalité issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 et mise en œuvre dès le début 2010. Cette nouvelle procédure dite a posteriori permet à tout justiciable, au cours d’une instance, de contester la constitutionnalité d’une disposition législative qui lui est applicable. C’est notamment par ce biais que l’ancienne procédure de la garde à vue a pu être déclarée inconstitutionnelle au regard de l’atteinte substantielle qu’elle portait aux droits de la défense (Décision n° 2010-14/22 QPC du 30 juillet 2010).

Chaque équipe participante (de 5 membres maximum) doit répondre à un cas pratique construit par le Conseil scientifique du Concours Vedel. Deux parties s’affrontent alors : le demandeur qui doit démontrer l’inconstitutionnalité de la disposition contestée, le défendeur dont le but est de défendre la loi contre les griefs allégués.

La sélection des 4 équipes admises à plaider dans la réputée rue Montpensier se fait sur la base d’un mémoire QPC « distinct » du fond de l’affaire et « motivé » en droit dans lequel la clarté et le mode de raisonnement juridique, l’utilisation de la jurisprudence constitutionnelle et la recherche fouillée des normes de références pouvant fonder le contrôle du juge constitutionnel sont évalués souverainement par le jury du concours.

Passé le « filtrage » du jury, la plaidoirie se déroule dans la salle d’audience QPC du Conseil devant un jury hautement qualifié qu’il s’agira de convaincre tant sur le fond que sur la forme. Tout l’enjeu est ici de trouver le ton juste, d’être efficace et concis dans l’énonciation pertinente des différents moyens retenus et de respecter le court délai imparti de 15 minutes. Le jury se réunit ensuite pour élire la meilleure équipe en demande et la meilleure équipe en défense.

L'équipe de l'université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, lauréate du Prix Georges Vedel 2014 pour les "défendeurs"
L’équipe de l’université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, lauréate du Prix Georges Vedel 2014 pour les « défendeurs »

Astuces de vainqueur :

Pour le demandeur, l’enjeu principal est de lier son affaire personnelle à une question plus générale de constitutionnalité. Il doit alors démontrer que la loi qui lui est applicable est susceptible de créer une atteinte substantielle à des droits ou libertés que la Constitution garantie.

Face à lui, le défendeur risque de tomber dans l’écueil d’une argumentation aride et institutionnelle qui paraîtrait jouer contre les droits ou libertés. Il faut donc trouver le positionnement juste, faire un effort d’explication de la disposition contestée tout en démontrant en quoi elle permet une conciliation entre deux ou plusieurs libertés parfois opposées.

C’est un « concours-complet », si l’on peut dire, puisqu’il impose de mettre en cohérence la jurisprudence constitutionnelle, administrative et judiciaire, de saisir pleinement l’effet des dispositions constitutionnelles et de comprendre la mécanique inhérente à la disposition contestée. L’influence du droit européen, bien que le Conseil se refuse à effectuer un contrôle de conventionnalité, doit du reste servir à expliciter l’argumentation.

Notons par ailleurs, que vous aurez l’occasion de découvrir ou de redécouvrir la mine d’or juridique que met à disposition le Conseil constitutionnel sur son site internet : la totalité de ses décisions sont accessibles et sont le plus souvent accompagnées d’un communiqué de presse, d’un rapport sur les normes de référence utilisées et, miracle de la technique, des vidéos des plaidoiries QPC des avocats des parties ainsi que du représentant du Secrétariat Général du Gouvernement.

Pour qui rêverait d’aller plaider au Conseil constitutionnel, le concours Vedel est unique en son genre. Le(la) plaideur(se) n’est pas seul(e) et il faut mettre en place un véritable travail d’équipe qui se nourrit des réflexions, de la vision et des compétences de chacun promettant de longues heures de débat sur la stratégie à adopter.

Ce concours n’est pas seulement ouvert aux constitutionnalistes et publicistes, loin s’en faut ! La QPC fait entrer la Constitution dans les chaumières. Le droit constitutionnel se décloisonne et nous parle de la famille, de la religion, du travail, de l’entreprise, de la propriété, de la dignité humaine, de la société… Bref, autant de champs desquels nos amis privatistes ont une expertise fondamentale à apporter dans l’édification d’une argumentation juridique solide tournée toute entière vers la défense des droits et libertés fondamentaux.

Par l’intermédiaire de la QPC, la Constitution se saisit de nouveaux champs classiquement réservés à d’autres branches du droit. Futurs(es) chercheurs(ses), futurs(es) praticiens(nes), saisissez à votre tour la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, le Préambule de 1946 et la Charte de l’environnement, le texte du 4 octobre 1958.

En quelques années seulement, le Concours Vedel est devenu une étape fondamentale pour tout juriste dans la maîtrise de ce nouveau contentieux extrêmement puissant qu’est la QPC. En effet, dans cet exercice, la QPC révèle toute sa force pour faire cesser les atteintes aux droits et libertés tout en redonnant au citoyen une place centrale dans la délibération démocratique. Par ce procédé,  le citoyen devient enfin majeur constitutionnel et peut contribuer à façonner les droits et libertés de demain. C’est assurément vous qui porterez leurs voix !

Nous tenons vivement à remercier M. Le Professeur Dominique Rousseau, les membres du jury et son président le Professeur Jean Gicquel, le Conseil constitutionnel qui a ouvert son prétoire à nos plaideurs ainsi que Mme Irène Guittin de Lextenso édition qui nous a apporté un soutien logistique sans faille tout au long de cette 4e édition du Concours G. Vedel.

En espérant vous voir encore plus nombreux l’année prochaine,

Cottet-Emard Benjamin, pour l’équipe Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

 

Lien vers le cas pratique de cette année : http://www.lextenso-editions.fr/cas-pratique-de-la-4eme-edition-du-concours-georges-vedel-de-la-meilleure-plaidoirie-de-la-question

 

 

 

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