Le référendum d’initiative populaire

 

 


 

La France s’est dotée, lors de la réforme constitutionnelle de 2008, d’un « référendum d’initiative populaire » devant permettre de soumettre aux électeurs une proposition de loi soutenue par une minorité de parlementaires et une fraction du corps électoral. Parcours d’une réforme passée au second plan lors de la réforme constitutionnelle.

 


 

I.   Une appellation trompeuse


Prévu à l’article 11 de la Constitution, le référendum d’initiative populaire complète le référendum à l’initiative du président de la République. Toutefois, cette nouvelle procédure tient plutôt du « référendum d’initiative minoritaire » (Olivier Duhamel), voire plus honnêtement du référendum d’initiative… parlementaire.

 

En effet, si les électeurs sont appelés à apporter leur concours dans cette procédure, c’est afin de soutenir la proposition de loi d’un cinquième des parlementaires (soit 184 députés ou sénateurs). L’initiative appartient donc au législateur, qui devra d’abord s’assurer du soutien d’un dixième des inscrits sur les listes électorales (soit actuellement environ 4,5 millions d’électeurs).

 

De plus, l’article 11 al. 5 prévoit que « si la proposition de loi n’a pas été examinée par les deux assemblées dans un délai fixé par la loi organique, le Président de la République la soumet au référendum. » Le référendum n’interviendrait donc qu’en l’hypothèse où la proposition de loi n’arrivait pas à être adoptée en des termes identiques par les deux chambres du Parlement, dans un délai d’un an après la déclaration de constitutionnalité de la proposition de loi par le Conseil constitutionnel.

 

petit juriste referendum d'initiative populaire

 

II.   La consécration du peuple législateur ?


L’article 11 al. 3 précise que ce référendum ne peut porter que « sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la Nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d’un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions. » Il est donc exclu de faire de cette procédure une « troisième chambre » où une partie des électeurs pourrait prendre l’initiative de lois dans des domaines à porté très générale.

 

De plus, l’initiative « ne peut avoir pour objet l’abrogation d’une disposition législative promulguée depuis moins d’un an » (al. 3). Exclue aussi donc, la possibilité pour l’opposition de faire du référendum d’initiative minoritaire l’instrument d’appel au peuple en vue de « contre-légiférer » rapidement après l’adoption d’une loi impopulaire. 

 

III.   Un contrôle constitutionnel avant le référendum

 

Enfin, le Conseil constitutionnel sera amené à contrôler la proposition de loi. Si les Sages se refusent à contrôler la constitutionnalité d’une loi référendaire, se rangeant ainsi à la conception selon laquelle le référendum est l’expression directe de la souveraineté nationale, l’article 61 de la Constitution prévoit que « […] les propositions de loi mentionnées à l’article 11 avant qu’elles ne soient soumises au référendum […] doivent être soumis au Conseil constitutionnel. » Ce « filtre » doit permettre d’éviter que sous le coup de circonstances particulières, une loi violant les droits et libertés ou l’organisation des pouvoirs garantis par la Constitution ne soit soumise à référendum.

 

D’initiative populaire, le référendum n’a plus donc que le nom, et l’on voit qu’autant pour l’initiative que pour le caractère référendaire, les électeurs n’interviennent que secondairement dans le processus. On est loin  de la révolution juridique que certains pensaient entr’apercevoir, et le privilège de légiférer appartient toujours aussi solidement aux représentants de la Nation.

 

 

Jean-Christophe GROGNET


 

Pour en savoir plus


Débats parlementaires sur le référendum d’initiative populaire 

 

Procédure détaillée


 

 

 

 

 

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